tag:blogger.com,1999:blog-74337985006892084232024-03-13T20:23:35.438-07:00discipline in disorderxgatitoxhttp://www.blogger.com/profile/02212462520844075854noreply@blogger.comBlogger333125tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-43511641385252996672018-09-08T15:36:00.002-07:002018-09-08T23:40:15.662-07:00Fred Hanak est mort. <div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://4.bp.blogspot.com/-C-YmEdvv_8g/W5RMOjzbURI/AAAAAAAAAJU/9ORrDmevKRM-tKwA4Ep6n07RxTht1W9DwCLcBGAs/s1600/fred%2Bhanak.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="348" data-original-width="640" height="174" src="https://4.bp.blogspot.com/-C-YmEdvv_8g/W5RMOjzbURI/AAAAAAAAAJU/9ORrDmevKRM-tKwA4Ep6n07RxTht1W9DwCLcBGAs/s320/fred%2Bhanak.jpg" width="320" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
<br />
<div class="MsoNormal">
Je ne le connaissais pas bien, mais je l’avais suffisamment lu
pour le respecter, et suffisamment fréquenté pour le considérer comme un ami. Dans
les années 2000, nous écrivions tous les deux dans les colonnes de <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Chronicart</i>. J’aimais la façon dont il parlait
du hip-hop, ses phrases tortueuses, ses images stupéfiantes, ces mots qu’il assemblait
avec un fer à souder, Beat dans l’esprit, beats dans le corps.<o:p></o:p><br />
<br />
Quand il ne pigeait pas pour <i>Chronicart</i>, il construisait avec son frère JB l'aventure singulière de dDamage, duo crissant au croisement des musiques les plus avancées du moment. Leurs disques n'étaient pas ceux d'un "groupe-français", mais d'un commando internationaliste qui attirait à lui les talents les plus baroques de la planète, avec lesquels ils construisaient des collages enragés et dissonants.<br />
<br />
Avec Thomas Blondeau, il avait écrit deux livres sur leurs rencontres de grandes figures du hip-hop contemporain, auxquels ils avaient donné un beau titre : "Combat Rap", qui rappelle que ce genre ne fut pas toujours le monstre marketing qu'il est devenu aujourd'hui ; et c'est ce que le hip-hop, s'il veut rester vivant, doit toujours demeurer : un combat. C'est ce qu'il défendait dans <i>Chronicart </i>quand, l'un des premiers en France, il donna à Gucci Mane <a href="https://www.chronicart.com/digital/gucci-mane-le-sud-bipolaire/">l'accolade fascinée</a> que son génie barré méritait.</div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<div class="MsoNormal">
Dans ce journal qui tenait plus d’une mailing list que d’une
rédaction, nous ne nous rencontrions jamais. En dix ans, je n’ai pas dû le
croiser plus de deux fois, et nous n’avons jamais vraiment discuté ensemble. Je
me souviens cependant qu’un jour, dans les locaux rue Béranger qu’occupait le
journal, je lui avais parlé de ce livre que je m’apprêtais à écrire, sur le
G-Funk et Dr. Dre. Je ne sais plus ce qu’il m’avait répondu. J’ai finalement écrit
le livre seul, parce que, finalement, c’est comme cela que je devais l’écrire.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<div class="MsoNormal">
Mais lorsque, en 2014, après une discussion avec Etienne
Menu, j’ai songé à lui donner un post-scriptum pour la revue <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Audimat</i>, c’est à lui que j’ai pensé de
nouveau. Nous nous sommes alors rencontrés près de l’Elysée, dans un bar aux
murs tapissés de souvenirs de la Prohibition et de la mafia américaine. Quelques
mois plus tôt, interrogé par Auréliano Tonet du <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Monde</i> (un autre ancien de <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Chro</i>,
Paris est tout petit), il avait dressé de moi un portrait élogieux et moqueur
en Jacques Chirac de la critique rap, bon en politique étrangère, nul en
politique intérieure. J’avais aimé ce croquis bienveillant.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<div class="MsoNormal">
Ce soir-là, à deux pas de la place Beauvau, nous nous sommes
trouvés comme deux amis, aussi différents et aussi proches que le sont les gens
lorsqu’une même passion les anime. Il me racontait le Roi Heenok, je faisais
des théories sur les mixtapes, il me parlait de dDamage, je lui dis mon envie de
donner une suite (2005-2015) à <i style="mso-bidi-font-style: normal;">« Gangsta
Rap »</i>. On décida de la faire ensemble.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<div class="MsoNormal">
On se revit alors, le plus souvent autour d’un verre. Il me
parlait de sa vie, de ses galères de traducteur-lexicographe, et son rapport à
la langue m’apparaissait sous un autre jour. On échangea des concepts, des bouts
de rédaction, et finalement le texte fut publié dans le numéro 5 d’<i style="mso-bidi-font-style: normal;">Audimat</i>. On m’a dit qu’il a rencontré un
certain succès. Les fulgurances de Fred n’y sont pas étrangères.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<div class="MsoNormal">
On a gardé le contact. On s'écrivait par mail. Pas souvent, mais régulièrement. Je le consultais, il m’envoyait
des idées d’articles, me demandait mon avis. Je lui disais qu’il était bien
plus savant que moi sur les sujets sur lesquels il écrivait, et c’était vrai. J’aurais
aimé le voir plus souvent, mais venir à Paris était pour lui compliqué, et je n'ai jamais songé à me rendre dans la banlieue où il habitait. Quand il était là, je le
voyais fragile, je le sentais sensible, mais je ne lui ai jamais posé de question.
La réponse que j’ai reçue aujourd’hui est tragique et définitive. Je pense ce
soir à son frère JB et à leur famille.</div>
<div class="MsoNormal">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<div class="MsoNormal">
Quand <i style="mso-bidi-font-style: normal;">« Gangsta
Rap »</i> est reparu ce printemps dans une nouvelle édition mise à jour, je
lui en ai adressé un exemplaire, avec une dédicace qui le priait de commencer
le livre par la dernière page. Car c’est par son nom qu’il s’achève. <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<div class="MsoNormal">
So long, comrade.</div>
Pierre Evilhttp://www.blogger.com/profile/07633036265289967374noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-87048140392763986922016-04-19T16:47:00.001-07:002016-04-19T16:47:26.361-07:00
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://2.bp.blogspot.com/-aZiXIeExUVE/VxbBvcTisfI/AAAAAAAAAIY/kM8HlXiuNq01LBos1YW9_GL8_hxY5xUNACLcB/s1600/holiczer.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://2.bp.blogspot.com/-aZiXIeExUVE/VxbBvcTisfI/AAAAAAAAAIY/kM8HlXiuNq01LBos1YW9_GL8_hxY5xUNACLcB/s320/holiczer.jpg" width="320" /></a></div>
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">Piero Holiczer – <em>L’Underground à Préaux-du-Perche</em> – éditions
Les Bain-Douches d’Alençon (2015)<o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">C’est un petit trésor déniché sur les étals de la libraire
éphémère qui conclut l’exposition <em>Velvet Underground – New York Extravaganza </em>de
la Philharmonie de Paris. Le genre de découverte qu’habituellement on ne fait
qu’en rêve, quand les différents plans étanches de nos vies bien rangées s’inclinent
et s’entrecroisent pour faire naître des rencontres impossibles. <o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">Imaginez : le fils d’un martyr de l’antifascisme
italien, devenu cinéaste underground à New York – où il fut le premier à filmer
le Velvet Underground –, et qui alla s’échouer dans la campagne normande où il
projetait ses films en hommage à Allen Ginsberg dans des salles communales, pour
un public de villageois tout droit sortis des pages du journal <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Le Perche</i> (les articles sont en facsimile dans le livre).<o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">C’est l’histoire de Piero Holiczer, héros méconnu des
sixties devenu clochard céleste au fin fond de l’Orne, racontée en 70 pages et
presque autant de documents dans cette émouvante brochure éditée par les
Bains-Douches (centre d’art contemporain d’Alençon). <o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">On y voit les flyers surréalistes que Holiczer produisait
pour annoncer ses « festivals » aux habitants de Préaux-du-Perche, ce petit village normand où
il s’était installé à la fin des années 1960 après ses aventures américaines. Là-bas,
il avait croisé Angus McLise, Jonas Mekas, Andy Warhol ; ici, il était
désormais « Piero », l’original qui ne manquait jamais une fête
communale, qui faisait la conversation à tout le monde mais qui vivait
farouchement seul dans sa ferme délabrée ; et ceux qui étaient depuis
longtemps à Préaux se souvenaient qu’un jour de l’été 69 il avait présenté un
film avec des femmes à poil à tous les habitants du village (c’était son film
sur Jeanne d’Arc, il avait fait scandale, mais les gens avaient fini par lui
pardonner). <o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">Ce petit livre nous donne aussi le témoignage de ses
voisins et voisines, qui parlent de ses habitudes étranges – quand il ne faisait pas les
marchés de la région avec sa charrette de livres d’occasion, il régnait sur son
domaine vêtu d’un simple short qui lui donnait un faux air de Tarzan, si Tarzan
avait été un clochard allogène dans la campagne normande. Ecologiste radical
avant l’heure, il ne supportait pas que l’on coupe des végétaux – les fermiers
du coin attendaient qu’il soit parti pour aller tailler en douce les haies
autour de son terrain.<o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">Son histoire est tragique, évidemment. Sa lente dérive le
mena de la marginalité poétique aux rives sombres de la maladie mentale : il
sera interné pendant six mois en hôpital psychiatrique pour avoir planté un
rival avec un tournevis ; et il finit sa vie renversé par un camion en
1993, alors qu’il roulait sur les routes du Perche avec sa mobylette.<o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">Piero Holiczer (1937-1993), un destin à la Nico, à la Angus McLise, à la Barbara Rubin, ces étoiles filantes de l’Underground qui se sont
toutes éteintes loin, très loin de New York, bien des années après leur moment
d’incandescence au cœur des sixties tumultueuses. Dans l’exposition sur le VU, Piero
Holiczer a son totem, comme Nico, comme Angus McLise, comme Barbara Rubin (qui
joue les premiers rôle dans l’histoire alternative des débuts du Velvet que j’ai
donnée au magazine de la Philharmonie, </span><a href="http://philharmoniedeparis.fr/en/node/7216"><span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">ici</span></a><span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">). <o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">De lui on parle encore, parce qu’il a produit quelques œuvres
qui n’ont pas été perdues, parce qu’il a été là à un moment décisif de l’histoire
subculturelle du siècle écoulé, quand d’autres ne sont plus que des silhouettes
floues dans la mémoire de ceux qui se souviennent encore de cette époque. Il y a
au début du livre une très belle lettre de Jean-Jacques Lebel, cette figure
trop peu célébrée de l’Underground français, qui parle de « Piero »
comme faisant <i style="mso-bidi-font-style: normal;">« partie de cette
tribu d’ombres flottantes qui peuple [ses] souvenirs, avec d’autres nommés Dave
Berry, Jacques Gabriel, Mason Hoffenberg, Roz Payne, Pierrot Blachier, Nina
Thoeren, Charles Henri Ford, Candida Schell, Bernard Saby, Serge Bricianier,
Etienne O’Leary, Emilio Villa, Christian Lagant, Bob Thompson, qui n’ont laissé
que de fragilissimes traces, quasiment imperceptible »</i>. Recherchez
chacun de ces noms sur Internet, et c’est toute une histoire alternative du 20<sup><span style="font-size: x-small;">ème</span></sup>
siècle que vous découvrirez, entre conseillisme, surréalisme et psychédélisme.<o:p></o:p></span></div>
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">
</span><br />
<div class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 10pt;">
<span style="font-family: "Courier New", Courier, monospace;">Aujourd’hui, un sentier de promenade de Préaux-au-Perche
passe au lieu-dit « Les Friches », là où était la maison de Piero
Holiczer. Sa masure est toujours là, en ruine. Les gens du coin l’appellent « la
maison du poète ». On peut toujours y voir une presse à imprimer, qui ne
marche plus depuis longtemps.<o:p></o:p></span></div>
Pierre Evilhttp://www.blogger.com/profile/07633036265289967374noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-18871222658790328162015-01-13T10:22:00.000-08:002015-01-13T23:49:55.061-08:00Quote : Georges Hyvernaud, Le wagon à vaches<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://3.bp.blogspot.com/-r3ArhOWikdM/VLVe1Hejg7I/AAAAAAAAK9o/GYNvA9iOfY0/s1600/Georges-Hyvernaud-250x300.gif" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-r3ArhOWikdM/VLVe1Hejg7I/AAAAAAAAK9o/GYNvA9iOfY0/s1600/Georges-Hyvernaud-250x300.gif" /></a></div>
Tant pis. La littérature française, Dieu merci, peut se passer de mes services. Elle ne manque pas de bras, la littérature française, ça fait plaisir. Elle ne manque pas de mains. On en a pour tous les goûts, pour toutes les besognes. On a des anxieux, des maux du siècle, des durs et des mous, des bien fringués, des chefs de rayon. On a les officiels en jaquette, pour centenaires et inaugurations de bustes. On a les anarchistes qui portent un pull-over jonquille et qui sont saouls à onze heure du matin. Ceux qui sont au courant de l'imparfait du subjonctif, ceux qui écrivent merde, ceux qui ont un message à délivrer et ceux qui sont les gardiens de la tradition nationale. Ceux qui me font penser à mon cousin Virgile qui n'était bon à rien : alors il s'est engagé et puis il est devenu sous-officier - voilà où ça mène de s'engager. Les littérateurs engagés, les littérateurs encagés. (...) Et les petits jeunes gens qui parlent tout le temps de leur génération. Et s'ils racontent en deux cents pages qu'ils ont fait un enfant à la bonne de leur mère, cela devient le drame d'une génération...<br />
(pages 31 et 32)
<br /><br />
<b>Georges Hyvernaud, <i>Le wagon à vaches</i>, Denoël, 1953 / Le Dilettante, 1997</b>Arturo B.http://www.blogger.com/profile/13375230381584505653noreply@blogger.com6tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-36907283306767907612014-03-25T02:45:00.000-07:002014-03-25T02:45:37.141-07:00Quote : Olivier Larronde, Les barricades mystérieuses, 1946<a href="http://2.bp.blogspot.com/-qoJ4BMCgEZY/UzFPpffFRGI/AAAAAAAAAvk/N6TbNcCzzmQ/s1600/17singe.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-qoJ4BMCgEZY/UzFPpffFRGI/AAAAAAAAAvk/N6TbNcCzzmQ/s400/17singe.jpg" /></a><br />
<br />
<b>Pix : Olivier Larronde</b><br />
<br />
<b>« Je me dispute avec le soir fragile et casse,<br />
Casse comme une vitre et j’ai plusieurs cadavres.<br />
On me recueille, on me recolle, et on se lasse : <br />
Je couche avec un coin de mur que mon air navre.<br />
<br />
La femme en mouvement a l’air d’une tenture : <br />
La plier, la ranger, puisqu’elle me dérange,<br />
Puisqu’elle me déplie ! me débarrasser d’anges<br />
Geôliers, qui défont et refont mes pliures !<br />
<br />
La pluie montre ses dents, exige la lumière<br />
Mon envie de crier, comme un doigt qu’on déplie,<br />
Tire, tire les fils du nez de la mercière<br />
Qui maigrit, mais qui tourne, embobinant la pluie».<br />
<br />
Olivier Larronde, <i>Les barricades mystérieuses</i>, L'Arbalète, 1990, p.8.</b>bazookahttp://www.blogger.com/profile/09239344261889427822noreply@blogger.com8tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-18016097562958220042014-02-26T14:16:00.000-08:002014-02-26T14:30:22.327-08:00Ekaterina Anokhina, 25 weeks of winter, Peperoni books, 2013<a href="http://2.bp.blogspot.com/-uj3LThN3-bY/Uw5W4ANqGqI/AAAAAAAAAto/ozr3WRM8EzI/s1600/25-weeks-of-winter.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-uj3LThN3-bY/Uw5W4ANqGqI/AAAAAAAAAto/ozr3WRM8EzI/s320/25-weeks-of-winter.jpg" /></a><br />
<br />
<br />
1982, sur le tournage d’"Agatha" Marguerite Duras rappelle : «C’est par le manque qu’on dit les choses. Le manque à vivre, le manque à voir. C’est par le manque de lumière qu’on dit la lumière. C’est par le manque à vivre qu’on dit la vie. Le manque du désir, qu’on dit le désir. Le manque de l’amour, qu’on dit l’amour. C’est une règle absolue».<br />
<br />
Que faire de toute la solitude, de toute la souffrance que l’on porte en soi ? Que faire de tout ce manque si ce n’est le traduire sur la peau translucide de la pellicule. Le sublimer par l’image…<br />
C’est bien ce qui se joue dans "25 weeks of winter" de la jeune photographe russe Ekaterina Anokhina.<br />
<br />
<a href="http://3.bp.blogspot.com/-5VxRzkY8-us/Uw5XJUIauYI/AAAAAAAAAtw/ymTReNA3nao/s1600/001.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-5VxRzkY8-us/Uw5XJUIauYI/AAAAAAAAAtw/ymTReNA3nao/s320/001.jpg" /></a><br />
<a href="http://4.bp.blogspot.com/-WhZZAmmXBcE/Uw5XrJqtvoI/AAAAAAAAAt4/5zP-M8mDRrc/s1600/011.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-WhZZAmmXBcE/Uw5XrJqtvoI/AAAAAAAAAt4/5zP-M8mDRrc/s320/011.jpg" /></a><br />
<br />
<br />
Des couleurs saturées et floues, des noir & blanc métalliques, parfois granuleux… « 25 weeks of winter » est un livre qu’on ose à peine effleurer par peur de toucher à quelque chose... Car ce petit livre au format et à l’attache fragile, raconte une histoire très intime. Trop intime. L’histoire même d’Ekaterina Anokhina (Ce que nous apprendra plus tard un court texte « Case of patient E », dont la photographe a confié la rédaction à la plume froide et distante d’une psychanalyste, et qu’elle a pris soin de glisser à la fin du livre pour ne pas en perturber la lecture). <br />
Mais pour l’instant, feuilletant le livre, nous ne savons rien encore. Nous ne savons rien, et pourtant… au fil des pages, nous serons troublés. Désorientés. Mal à l’aise. Nous serons frappés par ces lieux à peine identifiables figés dans le froid et la brume, ces corps, ces visages qui se dérobent, fouillant dans le flot des images blanches pour y trouver ce qui n’est pas visible. Oui, ce qui se joue-là à quelque chose à voir avec le manque… On le sent, on le perçoit. D’emblée.<br />
<br />
<a href="http://1.bp.blogspot.com/-LMNA7rZlq10/Uw5XydP2kTI/AAAAAAAAAuA/cx-RPmzIgf0/s1600/002.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-LMNA7rZlq10/Uw5XydP2kTI/AAAAAAAAAuA/cx-RPmzIgf0/s320/002.jpg" /></a><a href="http://1.bp.blogspot.com/-sjHdAc2Yg5w/Uw5X-WezUJI/AAAAAAAAAuI/oXFiICNLacw/s1600/009.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-sjHdAc2Yg5w/Uw5X-WezUJI/AAAAAAAAAuI/oXFiICNLacw/s320/009.jpg" /></a><br />
<br />
"25 weeks of winter" est le journal en image d’une séparation. L’album d’un amour, et de sa rupture. Et de la difficulté à oublier. Histoire d’un long hiver à apprendre à désaimer, de deux amants perdus dans le silence perçant, ouvrant les vannes des murailles de la mémoire, éclatant les briques suspendues, effractant les brumes opaques sur le grand large des fièvres. <br />
Ici, dans la mélancolie sourde des clichés, plus de langage, plus de tribu, plus de famille. Juste le silence et le sang de métal du chant de la destruction pure. L’expérience de la douleur. Des états limites. Du désespoir et du souvenir tendre. De l’agonie et de la perte. L’expérience de la maladie de l’amour. Du désir pas encore éteint.<br />
<br />
<a href="http://2.bp.blogspot.com/-RDQ45bR_lNM/Uw5YQPc4b8I/AAAAAAAAAuQ/QQ_mJX1chWI/s1600/014.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-RDQ45bR_lNM/Uw5YQPc4b8I/AAAAAAAAAuQ/QQ_mJX1chWI/s320/014.jpg" /></a><br />
<a href="http://4.bp.blogspot.com/-9PzQ9aS7mvI/Uw5Z2BpebMI/AAAAAAAAAu0/_HCVIdb7G0c/s1600/007.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-9PzQ9aS7mvI/Uw5Z2BpebMI/AAAAAAAAAu0/_HCVIdb7G0c/s320/007.jpg" /></a><br />
<br />
Oui, "25 weeks of winter", c’est le temps qu’il faudra à Ekaterina pour défaire cet amour. Le temps de se raccrocher au souvenir encore là, mais où déjà elle ne reconnaitra plus rien. Le temps de s’apercevoir, de vivre soudain avec le sentiment que tout s’échappe, tout fuit, inexorablement, malgré tout. « Quand on est arrivé au bout de tout, disait Céline, et que le chagrin lui-même ne répond plus, alors il faut revenir en arrière parmi les autres ».<br />
<br />
<a href="http://3.bp.blogspot.com/-PcO6fu2Jukg/Uw5aGHYC1kI/AAAAAAAAAu8/Lw4_TLK6x7o/s1600/018.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-PcO6fu2Jukg/Uw5aGHYC1kI/AAAAAAAAAu8/Lw4_TLK6x7o/s320/018.jpg" /></a><br />
<a href="http://2.bp.blogspot.com/-vO7cvCwdVFU/Uw5YsDOZYXI/AAAAAAAAAuo/J9-z-ucwsb8/s1600/015.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-vO7cvCwdVFU/Uw5YsDOZYXI/AAAAAAAAAuo/J9-z-ucwsb8/s320/015.jpg" /></a> <br />
<br />
<br />
Refermant le livre, le soleil serait revenu, vert et cru, irradiant le sol d’une multitude de petites fleurs sauvages aux reflets électriques. <br />
Il ferait toujours aussi froid. <br />
Nous serions au sud de l'hiver.<br />
Et la solitude… la solitude… Rien. La solitude. Rien.<br />
<br />
<a href="http://4.bp.blogspot.com/-ZVtuBSFrUFM/Uw5a6azSxYI/AAAAAAAAAvE/opXuE8k-_pY/s1600/10.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-ZVtuBSFrUFM/Uw5a6azSxYI/AAAAAAAAAvE/opXuE8k-_pY/s320/10.jpg" /></a><br />
<br />
<b>Ekaterina Anokhina, "25 weeks of winter", Peperoni books, 2013.</b><br />
<br />
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bazookahttp://www.blogger.com/profile/09239344261889427822noreply@blogger.com3tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-36395350507878053732014-02-20T01:53:00.000-08:002014-02-20T01:53:26.008-08:00Quote : Raymond Bellour, Les rendez-vous de Copenhague, 1966<a href="http://4.bp.blogspot.com/-LJyEzLh2cWc/UwXP71p_9qI/AAAAAAAAAtY/wFbEvKUkU3w/s1600/stanley-kubrik-fotografo-L-2.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-LJyEzLh2cWc/UwXP71p_9qI/AAAAAAAAAtY/wFbEvKUkU3w/s320/stanley-kubrik-fotografo-L-2.jpg" /></a><br />
<br />
<b>Pix : Stanley Kubrick, circa 1950.<br />
<br />
"Ce fut la nuit d'une autre nuit. Ce fut d'abord le chaos d'une trop grande précipitation, la maladresse que dans son désarroi si grand il ne put éviter, et, dans le désordre du temps retourné, la peur, la peine, surtout le désir fébrile et défait, mêlés à chaque apparition. Puis vint un moment de terrible lassitude après l'évènement issu de l'impossible tenu à bout de bras, désigné dans sa forme et ses détours multiples, reconnu dans son sens et le manque effarant qu'il laisse au coeur. Ce furent alors la fatigue, le grand énervement silencieux du corps et de l'âme brisés. Puis vint l'apaisement, comme un hasard où l'on se roule, où le recueillement commence, où joue la possibilité même de l'impossible, quand le regard a glissé sur ce qui fait la douleur si vive."<br />
<br />
Raymond Bellour, Les rendez-vous de Copenhague, Editions Gallimard, 1966, p.234-235.</b>bazookahttp://www.blogger.com/profile/09239344261889427822noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-2755972776396902972014-01-19T04:45:00.000-08:002014-01-19T10:31:38.836-08:00Renata Adler, Speedboat (Hors-Bord), 1976<a href="http://2.bp.blogspot.com/-lPRmRROO2tA/UtvI3ZvcYII/AAAAAAAABRU/Wj7o2vdrvW0/s1600/RenataAdler_Avedon.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-lPRmRROO2tA/UtvI3ZvcYII/AAAAAAAABRU/Wj7o2vdrvW0/s320/RenataAdler_Avedon.jpg" /></a><br />
<br />
Inutile de chercher bien loin, vous ne trouverez pas, en cette rentrée littéraire, un livre aussi différent que <i>Hors-bord</i>, la traduction française inespérée du <i>Speedboa</i>t de Renata Adler. Peut-être parce qu’il date de 1976 (ah oui… 38 years in the dark !). Ce qui ne veut pas dire que la littérature c’était mieux avant, mais veut au moins dire qu’en 1976, les livres ne nous parlaient pas encore de DSK, et c’était déjà ça de gagné. Et puis, peut-être qu’en 1976, les écrivains ne perdaient pas leur temps et leur force à singer les journalistes tout en les méprisant. La littérature américaine flirtait avec le journalisme et vivait cet amour au grand jour. C’était plus sain, et surtout ça inventait plus de choses que ce pauvre Régis Jauffret n’en trouvera jamais, même en se baissant très bas. Renata Adler n’avait pas besoin de se baisser, critique de cinéma star au New Yorker, elle ne s’est pas décidée à écrire des livres pour placer la littérature au-dessus du journalisme. Elle n’a pas publié des livres pour corriger le journalisme. Il suffit de la lire pour comprendre qu’elle a eu besoin de la littérature à un moment précis pour expérimenter sur une séquence longue et dans un montage horizontal une science des images et des faits. Par goût du vertige devant des accumulations de fictions possibles et laissées en jachère. Alors ce livre, comme un enchaînement d’instantanés, de polaroïds sur des scènes, des souvenirs, des affabulations, qui, mis ensemble et sans qu’on y cherche la moindre logique, reconstituent l’ADN névrotique de l’Amérique des années 70. Ce sont des faits, des faits enfilés, scannés. Qui écrit comme ça aujourd’hui ? Pas grand monde. Même pas Joan Didion ou DeLillo, avec qui on a envie de la rattacher. Personne ? Vraiment personne ? Si ! Il y a une page, chaque mois, et c’est le plus précieux des rendez-vous : la dernière page du plus ancien (164 ans !) des grands mensuels chic américain, Harper’s. Cette page indispensable s’appelle <i>Findings</i>, elle tient en une magnifique succession de faits racontés sur deux lignes, accolés sur une page, sans écart ou interstice pour indiquer qu’ils étaient de nature différente jusqu’à ce que ce montage sec en révèle la poétique additionnelle. Exactement ce que <i>Speedboat</i> nous fait, sur un horizon lointain de 247 pages. Avec l’acuité d’une lame en acier trempé (littéralement…).<br />
<br />
<b>«Le talent enflammait les colonnes des journaux jusque sur les tables basses. La métaphore de l’agression physique avait pris d’assaut les critiques. « Tripes », un mot que l’on croisait rarement en dehors de la saison de la chasse, était un substantif adoré de la prose littéraire. Les gens en avaient ou en manquaient, disait-on, pour percevoir la beauté ou offrir des distinctions morales inédites. « Saisir aux tripes » et « à vous remuer les tripes » étaient des marques d’approbation. Vous mettre « les nerfs à vif », « faire sortir les yeux de la tête », « broyer le cœur » - le critique sensible était écrasé, empalé, électrocuté. « Brûlant » était encore trop tiède. Ce qui n’avait provoqué qu’une foulure ou une extraction dentaire n’était qu’un chef d’œuvre mineur. « Littéralement », quelle que soit la situation, était à prendre au sens figuratif ; et non littéralement, donc. Ce film vous prendra à la gorge. Ce livre vous fera littéralement tomber de votre chaise.» <br />
(p.177)</b><br />
<br />
On ne résiste pas à vous poster la vo...:<br />
<b>«Talent was blazing through the columns and onto the coffee table. The physical-assault metaphor had taken over the reviews. « Guts » never much a word outside the hunting season, was a favorite noun in literary prose. People were said to have or to lack them, to perceive beauty and make moral distinctions in no toher place. « Gut-busting » and «gut-wrenching » were accolades. « Nerve-shattering », « eye-popping », « bone-crunching » - the responsive critic was a crushed, impaled, electrocuted man. 3searing » was lukewarm. Anything merely spraining or tooth-exctracting would have been only a minor masterpiece. « Literally », in every single case, meant figuratively ; that is not, litterally. This film will literally grab you by the throat. This book will literally knock you out of your chair.» <br />
(p. 81, de la réédition NY reviews Book, 2013)</b><br />
<br />
<b>Renata Adler, <i>Hors-Bord</i> (<i>Speedboat</i>), traduit par Céline Leroy, Edition de l'Olivier, Paris, 2014</b> <br />
<br />
pix: Renata Adler par Richard Avedon<br />
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pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-85388142219125282032014-01-09T08:20:00.000-08:002014-01-09T08:24:41.838-08:00Quote : Cesare Pavese, La mort viendra et elle aura tes yeux (Verrà la morte e avrà i tuoi occhi), 1950<a href="http://4.bp.blogspot.com/-MXRZBvdeZzg/Us7KRw-SO0I/AAAAAAAAAsM/u3EUdYu0CgQ/s1600/liberty_at_night.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-MXRZBvdeZzg/Us7KRw-SO0I/AAAAAAAAAsM/u3EUdYu0CgQ/s320/liberty_at_night.jpg" /></a><br />
<br />
<b>"La mort viendra et elle aura tes yeux -<br />
cette mort qui est notre compagne<br />
du matin jusqu’au soir, sans sommeil,<br />
sourde, comme un vieux remords<br />
ou un vice absurde. Tes yeux<br />
seront une vaine parole,<br />
un cri réprimé, un silence.<br />
Ainsi les vois-tu le matin<br />
quand sur toi seule tu te penches<br />
au miroir. O chère espérance,<br />
ce jour-là nous saurons nous aussi<br />
que tu es la vie et que tu es le néant.<br />
<br />
La mort a pour tous un regard.<br />
La mort viendra et elle aura tes yeux.<br />
Ce sera comme cesser un vice,<br />
comme voir resurgir<br />
au miroir un visage défunt,<br />
comme écouter des lèvres closes.<br />
Nous descendrons dans le gouffre, muets."<br />
<br />
Cesare Pavese, <i>Poésies variées : Travailler fatigue. La Mort viendra et elle aura tes yeux, Poésie/Gallimard, 1979.</i> <br />
<br />
Pix : Christine Boisson dans <i>Liberté, la nuit,</i> Philippe Garrel.</b>bazookahttp://www.blogger.com/profile/09239344261889427822noreply@blogger.com7tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-66156179968519733412013-12-29T04:33:00.000-08:002014-01-07T01:23:47.939-08:00Au Revoir 2013 : A Photobook List<a href="http://4.bp.blogspot.com/-NyRc7FVoq1o/UsAOT3365KI/AAAAAAAABOw/w3hYKPvn7y0/s1600/belle+epoque+1.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-NyRc7FVoq1o/UsAOT3365KI/AAAAAAAABOw/w3hYKPvn7y0/s400/belle+epoque+1.jpg" /></a><br />
<br />
Ok, cette liste arrive tard, alors que vous n’en pouvez plus. Vous attendez plutôt de nous une liste de moins à la place d’un Top Ten de plus, et ça tombe bien : nous sommes justement de mauvaise humeur. Pourtant, nous devrions sortir dans la rue les épaules recouvertes de cotillons : il n’y en a jamais eu autant de livres de photos que cette année. Mais ce fut avalanche de livres laids, chers, inutiles, cyniques, mal imprimés, mal séquencés, mal pensés, ou insidieusement édités à tout petits tirages pour être annoncés épuisés avant même d’avoir éclos – comme s’il suffisait qu’un livre soit épuisé pour être beau. Comme si sa rareté était le signe de son intelligence.<br />
Le domaine commence à vraiment intéresser beaucoup de monde, et parmi eux, tiens comme c’est étrange, des rapaces. Quand ils auront écoeuré tout le monde, ils partiront sévir ailleurs.<br />
Comme en réponse à ce climat délétère, il a paru cette année les livres les plus violents, les plus forts, les plus en colère de toute la décennie. Ils sont une poignée, mais ceux-là ont à nos yeux une telle valeur qu’elle dépasse de très loin la petite catégorie qui les concerne. <i>Control Order House</i>, ou <i>PIGS</i>, ou <i>Saluti da Pinetamare</i>, ou <i>Costa</i> (pour en choisir quatre) sont aussi de grands livres de critique sociale de notre époque. Ceux que nous cherchions et n’avions pas trouvé, chez Gibert, rayon Philosophie Politique. Ce n’est pas grave - suffisait de chercher ailleurs. On n’en sort pas.<br />
<br />
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<a href="http://1.bp.blogspot.com/-n2Nag7s2xZM/UsAOm-V0S1I/AAAAAAAABO4/ga6ln9N09m4/s1600/control+order+house.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-n2Nag7s2xZM/UsAOm-V0S1I/AAAAAAAABO4/ga6ln9N09m4/s400/control+order+house.jpg" /></a><b>Edmund Clark - Control Order House (Here Press, London)</b><br />
Ivan a déjà presque tout dit <a href="http://disciplineindisorder.blogspot.fr/2013/06/edmund-clark-control-order-house-2012_21.html">ici</a> sur ce livre qui, à lui seul, a dominé l’année, toute catégorie confondue. L’antithèse du joli livre qu’il suffirait de feuilleter pour en saisir le charme. Ici, pas de charme. Que du dur. Pour comprendre ce que l'on voit, il faut lire, et lire jusqu’au bout. Examiner des planches contacts d’appartements nus, témoins, qui ressemblent à des cellules en plein Londres, reprendre des kilomètres de textes émis par des cours de justice. Deviner que sous la crainte du terrorisme, c’est encore un peu de la liberté de chacun qui est mise sous contrôle. Si Foucault avait été photographe… Qu'est-ce qu'on voit là alors, mon cher Ivan? "<i>La multiplicité du contrôle via la normalité (le pavillon de banlieue est une prison parce qu'il est un pavillon de banlieue, This House is Britain…</i>"<br />
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<a href="http://3.bp.blogspot.com/-ZwEE5kDhVSI/UsAQcJJiXDI/AAAAAAAABPE/0zu53Oxp26s/s1600/82.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-ZwEE5kDhVSI/UsAQcJJiXDI/AAAAAAAABPE/0zu53Oxp26s/s400/82.jpg" /></a><br />
<b>David Thomson, 82 (Archive of Modern Conflict, London)</b><br />
Tout le monde, depuis trois ans, cherche à égaler AMC dans leur façon de faire vivre des photos d’archives. Et chaque année, AMC sort un livre qui laisse tout le monde derrière. Celui-ci se présente de façon totalement arbitraire sous la forme de deux volumes silencieux, recouverts de feutre blanc à valeur de neige, contenant chacun 82 photos prises par des soldats allemands durant la seconde guerre mondiale. Leur avancée dans le paysage d’abord, ce givre qui recouvre toute trace de combat et le grand vide des campagnes déjà désertées. Puis les villes, les ghettos, leurs habitants hagards, les gitanes qui montrent un sein contre une cigarette, dit la légende d’époque. Qui est derrière l’appareil photo ? Est-ce encore un humain, enrôlé sans le vouloir, ou une machine à gagner des positions : se permettre de prendre une image, est-ce déjà apposer un forme de pouvoir? Pas de réponse ferme, sinon qu’à la fin, parmi les ruines et les barbelés, on rencontre la photographie de deux épouvantails…<br />
PS: David Thomson, l'un des deux cerveaux d'AMC, a choisi d'ordonner ainsi ce livre en la mémoire de son père, mort cette année à 82 ans. <br />
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<a href="http://1.bp.blogspot.com/-Ghex6ScqkmI/UsARSgxCVuI/AAAAAAAABPM/r71ZKAavbU0/s1600/stephengill_coexistence01.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-Ghex6ScqkmI/UsARSgxCVuI/AAAAAAAABPM/r71ZKAavbU0/s400/stephengill_coexistence01.jpg" /></a><b>Stephen Gill, Coexistence (Nobody, London)</b><br />
AMC n’est pas loin, Stephen Gill ayant publié une partie de ses livres (et parmi eux, son meilleur : <i>Hackney Wick</i>) chez eux. Mais avec <i>Coexistence</i> (paru à la toute fin 2012) que le plus grand photographe de l’East London (et soutenu par la meilleure librairie d’East London voire de toute l'Angleterre : Donlon Books) pousse plus loin encore l’étude et la capture de notre monde sensible à travers des assemblages invisibles de particules subatomiques. Pure affect, d’une beauté liquide, <i>Coexistence</i> devrait être rangé quelque part entre <i>La Vie dans les plis</i> (ou alors <i>La Nuit remue</i>) d’Henri Michaux et un traité de mathématique quantique.<br />
(C’est un détail, mais Gill a dédié ce livre, qui se présente sous la forme d’un cahier d’écolier tâché d’encre, à Sergio Larrain, photographe devenu bouddhiste, qui fut indéniablement la grande redécouverte « humaniste » de cette année à Arles. Antoine D'Agata a également dédié son nouveau livre, paru chez Super Labo au Japon, à Larrain et sa série Valparaiso. On dit ça on dit rien.)<br />
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<a href="http://2.bp.blogspot.com/-Xc08n6QYyL4/UsARrHos2EI/AAAAAAAABPU/PnlTXUvvqE8/s1600/saluti+cover.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-Xc08n6QYyL4/UsARrHos2EI/AAAAAAAABPU/PnlTXUvvqE8/s320/saluti+cover.jpg" /></a><b>Salvatore Santoro, Saluti Da Pinetamare (Autoédité, Italie)</b><br />
La carte postale sur la couverture est évidemment un leurre. Ce que Salavatore Santoro montre tout au long de ce voyage dans l’Italie du Sud de Luglio où il a grandi, jusqu’aux environs de Naples, c’est la violence et l’ennui urbain, les paysages laissées en friche, le bétonnage sauvage, la laideur balnéaire devenue lentement la norme, ici comme là (ce livre aurait pu être fait en Espagne). Les populations locales fauchées, en quête de démerde, les gosses qui se font chier sur des terrains de jeux par 40° à l’ombre, les migrants qui pieutent dans la rue sur des matelas crevés ou des sièges de voiture arrachés, les centres commerciaux vides. Trente ans d’une catastrophe urbaine résumée en un livre. Ce que Ballard inventoriait comme étant de la science-fiction est devenue un état de fait. Le temps passe, même la laideur vieillit, et face à elle, il arrive même à Santoro d'éprouver de la mélancolie, sinon de la nostalgie. Car <i>Saluti Da Pinetamare</i> est aussi un livre très très intime.<br />
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<a href="http://4.bp.blogspot.com/-nKa79PXN-mA/UsAR8Z37NAI/AAAAAAAABPc/cUs9oKHHo-U/s1600/The-Pigs-photobook-cover-001.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-nKa79PXN-mA/UsAR8Z37NAI/AAAAAAAABPc/cUs9oKHHo-U/s320/The-Pigs-photobook-cover-001.jpg" /></a><b>Carlos Spottorno, THE PIGS, Phree & Editorial RM (Espagne)</b><br />
Autre grand livre de crise (elle aura a moins eu le mérite de nous offrir quelques livres féroces), <i>THE PIGS</i>. P.I.G.S. comme Portugal, Italie, Greece & Spain. Les cochons selon l’acronyme forgé par les penseurs du libéralisme maximal. Pour mieux les prendre à revers, Carlos Spottorno a produit un livre dont la maquette reprend à l’identique celle de <i>The Economist</i> (jusqu’à en parodier les pubs). Et là-dessus, à chaque photo de détourner un à un les clichés que l’on colle aux pays du Sud – la fainéantise comme sport national, le laisser-aller généralisé. Livre provocant, intelligent partout, et qui ne laisse personne indemne. <br />
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<a href="http://1.bp.blogspot.com/-JHZGGHQwaR0/UsASUclgenI/AAAAAAAABPk/gkPgVVXibIE/s1600/costa+cover.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-JHZGGHQwaR0/UsASUclgenI/AAAAAAAABPk/gkPgVVXibIE/s320/costa+cover.jpg" /></a><b>José Pedro Cortes, Costa (Pierre Von Kleist, Lisbonne)</b> <br />
José Pedro Cortes a signé en 2012 l’un des livres majeurs de la jeune photographie, <i><a href="http://disciplineindisorder.blogspot.fr/2013/12/elisabeth-tonnard-in-this-dark-wood-2008.html">Things here and things still to come</a></i>, dont la puissance sensible ne cesse de nous renverser. De l’autre coté, José et son compère André Principe (lui aussi surdoué) ont crée avec les éditions Pierre Von Kleist une maison d’édition/coopérative absolument unique (par plein d’endroits, par la sincérité totale qui les anime, ils me font penser aux Kill The DJ). Costa n’est pas un livre sur Pedro Costa (je dis cela car les PVK ont sorti aussi cet automne, au même moment, le fac-similé superbe du cahier d’avant tournage de <i>Casa de Lava<i></i></i> que Pedro Costa tenait en 1992). Non, <i>Costa</i> est une ballade silencieuse sur la cote, à quatorze kilomètres au sud de Lisbonne. Là où il n’y a plus que du vent, du sable, du bois sec, des plantes mortes, des pneus et des serpents. On entend le vent souffler en traversant ce livre. Les pieds s’enlisent et on suffoque. Tout commence à ressembler à quelque chose comme un pays du sud épuisé, n'en pouvant plus de traverser une crise sans fin.<br />
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<a href="http://3.bp.blogspot.com/-ysAQOBqwrwQ/UsAS0bJNfNI/AAAAAAAABPs/i2wgUGP5A6I/s1600/seba+kurtis+kif.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-ysAQOBqwrwQ/UsAS0bJNfNI/AAAAAAAABPs/i2wgUGP5A6I/s400/seba+kurtis+kif.jpg" /></a><br />
<b>Seba Kurtis, KIF (Here Press, London)</b><br />
Difficile de parler de <i>KIF</i> sans en froisser la magie. Disons que c’est d’abord un livre mince, 13 photos (+ 2), chose rare aujourd’hui (l’inverse total du <i>Sometimes i cannot smile</i> de Piergiorgio Casotti, un des bons premiers livres de cette année mais qui étouffe sous trop d’images, et aurait gagné à être resserré). Ces treize images, que racontent-elles ? Un voyage au Maroc à la recherche des traces d’un ami dealeur mort. Sibyllin, éclaté, doux, amer, plein de point de suspension, viscéral, courageux, KIF a des années d’avance sur la façon de défaire un récit. Au-delà du fait que visuellement parlant, c’est d’une beauté malade. <br />
PS 1: Il se trouve aussi que c’est, après <i>Control Order House</i>, un autre livre édité par Here Press, ce qui en fait sans aucun doute notre éditeur de l’année. <br />
PS 2 : On peut rapprocher <i>KIF</i> d’un livre très fort sur l’Algérie paru, discrètement en 2011 : <i>Diar El Mahçoul</i> de Christian Wachter. <br />
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<a href="http://1.bp.blogspot.com/-896xjk2SfGU/UsATA8Ii1JI/AAAAAAAABP0/bGQDnbcM2hs/s1600/nokolai.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-896xjk2SfGU/UsATA8Ii1JI/AAAAAAAABP0/bGQDnbcM2hs/s400/nokolai.jpg" /></a><b>Nikolay Bakharev – Amateurs & Lovers (Dashwood, NY)</b><br />
<b>Misha Pedan – The End of la Belle Epoque (Kimaira Publishing, Sweden)</b><br />
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Deux livres sur la fin du communisme. L’un montre le travail d’un homme qui, dans l’URSS des années 80, arpentait les rivières et les lacs pour prendre des familles en maillot, avant de faire dans son appartement des nus qui cherchent moins à faire bander qu’à échapper au contrôle du régime. Nikolay Bakharev, on s’en est aperçu en le découvrant cette année à New York puis à Arles, a arraché au régime des corps qui ne demandaient qu’à respirer.<br />
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<a href="http://4.bp.blogspot.com/-8bZjuuFj6Vg/UsAWOEW7UtI/AAAAAAAABRE/1VsNO6Cji_g/s1600/belle+epoque+2.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-8bZjuuFj6Vg/UsAWOEW7UtI/AAAAAAAABRE/1VsNO6Cji_g/s400/belle+epoque+2.jpg" /></a><br />
Misha Pedan lui a photographié les rues de l’URSS de 1986 à 1989, et c’est là encore le désir qui circule partout, à l’air libre, Rieur, devant des gardes et des militaires raides comme des marionnettes, les citadins cherchent le soleil, pour bronzer dès qu’ils le peuvent, les ouvriers flattent la silhouette d’une femme qui traverse la rue, des jeunes jouent à la guitare en bravant l’objectif comme si, par lui, ils s’adressaient directement à ceux qui les gouvernent. Sur la chaussée, une flaque énorme bloque la rue mais chacun l’enjambe. Le dégel vient de trouver son image. Le titre du livre indique un regret. L’entre deux était donc plus doux que l’éclatement qui est venu après ?<br />
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<a href="http://1.bp.blogspot.com/-muIZhSBDE-g/UsATZhwbCJI/AAAAAAAABQE/9HxjE7TypKI/s1600/bc_bible_cover_flat_72.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-muIZhSBDE-g/UsATZhwbCJI/AAAAAAAABQE/9HxjE7TypKI/s320/bc_bible_cover_flat_72.jpg" /></a><b>Adam Broomberg & Olivier Chanarin, Holy Bible (MACK – Archive Of Modern Conflict)</b><br />
AMC, once more. Peu de livres auront aussi immédiatement impacté l’année que la Sainte Bible revisitée/profanée par Broomberg & Chanarin. Introuvable après une semaine, <i>Holy Bible</i> divisait déjà le cénacle des collectionneurs à la fin du printemps. Ce montage, au sens godardien du terme, repassait des images anonymes de tout le siècle, sa violence, sa beauté, sa connerie, sa vulgarité, son insurpassable douleur, sous le sceau général de la confrontation. Le texte religieux devient le socle et/ou le paravent de toutes les barbaries. Son horizon, son excuse. Certains, surtout des photographes d’ailleurs, ont regretté toutefois que, par-delà le brio et la virtuosité dont ont toujours fait preuve B&C, le dispositif (qui consiste à souligner une phrase par page tirée de la bible et lui trouver dans les archives d’AMC son commentaire en image) n’arrive que trop rarement à dépasser l’intention ou la démonstration. Et qu’au fond, le duo n’arrive pas à inventer des écarts. Grand livre de guerre, malgré tout.<br />
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<a href="http://2.bp.blogspot.com/-7c8TOym70i0/UsATi-CksFI/AAAAAAAABQM/65K8tqPmlxA/s1600/as-dust-alights-signe.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-7c8TOym70i0/UsATi-CksFI/AAAAAAAABQM/65K8tqPmlxA/s200/as-dust-alights-signe.jpg" /></a><b>Vincent Delbrouck, As Dust Alights (Wilderness, Belgium)</b><br />
Delbrouck (dont l’influence sur la jeune école belge ne cesse de grandir) transforme un projet himalayen qui aurait du tourner au livre documentaire en une courte nouvelle poétique, un « haiku » dit-il. Kerouac (période <i>Tristessa</i>) mais avec une esthétique absolument contemporaine.<br />
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<a href="http://3.bp.blogspot.com/-FNOdxnezDUU/UsAT1gHWYBI/AAAAAAAABQU/CswkO4oCtvI/s1600/TBW-Subscription-Series-4.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-FNOdxnezDUU/UsAT1gHWYBI/AAAAAAAABQU/CswkO4oCtvI/s200/TBW-Subscription-Series-4.jpg" /></a><b>TWB books Serie 4 : Christian Patterson, Alessandra Sanguinetti, Raymond Meeks, Wolfgang Tillmans</b> <br />
Quatre livres fait main, avec une qualité d’impression de folie, sentant le gros carton bien épais, fragile et solide à la fois. Et dedans ? Christian Patterson confirme, deux ans après <i>Redhead Peckerwood</i>, qu’il est touché par la grâce dès qu'il s'agit de faire sortir toute la présence d’un objet. Ce mec est de plus en plus fantomatique. Son <i>Bottom of the lake</i> (Fond du Lac) justifie à lui seul la quête de cet objet rare. Alessandra Sanguinetti invente un roman de l’enfance sidérant, intérieur, Raymond Meeks déçoit un peu (dommage, pour une fois qu’un de ses livres était tiré à plus de 15 exemplaires) et Wolfgang Tillmans offre un série très douce sur un seul garçon - série belle mais mineure si on la compare aux planches de son livre majeur de l’an passé <i>Neue Welt</i> (qui exposées à Arles démontrait tout à coup que celui que les abrutis avaient pris pour un photographe (de) mode était le dernier grand documentariste contemporain). Bel ensemble…<br />
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<a href="http://3.bp.blogspot.com/-htULs_8CEsY/UsAUGqH4dHI/AAAAAAAABQc/Vzo5Whg1N68/s1600/iris+garden.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-htULs_8CEsY/UsAUGqH4dHI/AAAAAAAABQc/Vzo5Whg1N68/s200/iris+garden.jpg" /></a><b>John Cage/ William Gedney, Iris Garden (Little Brown Mushroom, USA)</b><br />
Inévitable bel objet 2013, ce petit <i>Iris Garden</i>, édité par Alec Soth, composant sous la forme d’un livre aléatoire en lequel se plient et se déplient au hasard des assemblages des images de William Gedney représentant John Cage et d’haïkus écrits par le musicien. La forme, la forme, jusqu’au vertige. Un livre d’avant-garde américaine, dans la tradition conceptuelle et surtout très ludique de certains Robert Frank (qui est suisse, certes) des années 60. Une réussite.<br />
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<a href="http://1.bp.blogspot.com/-GOQEsfChbFc/UsAUeDF8mfI/AAAAAAAABQk/bJ4srUvALUE/s1600/soares.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-GOQEsfChbFc/UsAUeDF8mfI/AAAAAAAABQk/bJ4srUvALUE/s400/soares.jpg" /></a><b>Maira Soares – Este Seu Olhar (autoédité, Brésil)</b><br />
Un carnet gris de tout petit format, enserré sous un noeud rose pale. On ose à peine ouvrir. Au recto les photos de la mère de Maira Soares, morte il y a trente-cinq ans. De l’autre, le remake à l’identique de ces photos par sa fille, qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau. La reprise après tout ce temps, d’une même image, son bégaiement qui est aussi le signe lourd de sa fatalité, la ressemblance comme seul héritage tissent autour de ce livre hanté quelque chose d’indicible. Maira Soares a, en plus, trouvé la forme et le format exact pour respecter l’intimité et la sensualité secrète qui est le cœur de son travail. Ne passez pas à coté de ce livre d’artiste troublant.<br />
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A rapprocher du fantastique <i>In This dark Wood</i> de Elisabeth Tonnard dont nous vous parlions la semaine dernière <a href="http://disciplineindisorder.blogspot.fr/2013/12/elisabeth-tonnard-in-this-dark-wood-2008.html">ici</a>.<br />
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<a href="http://2.bp.blogspot.com/-DulkwJdoFNM/UsAUsPhNInI/AAAAAAAABQs/M8xozQnDY5g/s1600/john-claridge-the-gorbals-3.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-DulkwJdoFNM/UsAUsPhNInI/AAAAAAAABQs/M8xozQnDY5g/s400/john-claridge-the-gorbals-3.jpg" /></a><b>John Claridge – The Gorbals (Café Royal Books, London)</b><br />
On suit toujours de près les fanzines que sortent au rythme d’un par semaine les éditions <i>Café Royal Books</i>. D’une part parce qu’ils sont tirés à 150 copies seulement (vendus le prix d’un petit déjeuner) et d’autre part parce que Craig Atkinson, qui dirige tout cela tout en fournissant le 2/3 des livres avec ses propres photos, a bâti au fil des années une véritable mémoire de la photographie anglaise. Si on est resté scotché par la découverte du boulot contemporain, social, de Jim Mortram, on a été encore plus soufflé par <i>The Gorbals</i>, une série méconnue de John Claridge datant de 1965. Claridge était un des grands noms de la photo de mode et de la publicité anglaise des années 60. The Gorbals le voit plonger de façon inattendu dans l’un des quartiers les plus pauvres du Glasgow de l’après-guerre, pour une immersion documentaire de deux jours. Il en ressort, noir comme à la mine, un livre d’une brutalité inouïe, sur les laissers-pour-compte des révolutions industrielles. On croirait que ces images ont un siècle et demie, contemporaine de Dickens ou de Stevenson. Elles n’ont pas cinquante ans… <br />
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<a href="http://4.bp.blogspot.com/-bbOqucftlDY/UsAUyRsY0HI/AAAAAAAABQ0/JDJmPJQurLo/s1600/fond+du+lac.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-bbOqucftlDY/UsAUyRsY0HI/AAAAAAAABQ0/JDJmPJQurLo/s400/fond+du+lac.jpg" /></a><br />
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pix upstair: Misha Pedan, The End of la Belle Epoque<br />
pix downstair: Christian Patterson, Bottom of the lake<br />
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pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-37529832839118813432013-12-26T02:51:00.001-08:002013-12-26T08:35:54.140-08:00Guillaume Serp, Les Chérubins Électriques, 1983<a href="http://4.bp.blogspot.com/-QyiV3ljIgek/UrwKIx5St5I/AAAAAAAABOY/xAhFMZ8K8_Y/s1600/28509_couv+-+copie.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-QyiV3ljIgek/UrwKIx5St5I/AAAAAAAABOY/xAhFMZ8K8_Y/s200/28509_couv+-+copie.jpg" /></a><br />
Dans le Paris Novö du début des années 80, un garçon achète <i>La Pravda</i> au <i>Drugstore</i> des Champs Élysée. Il ne sait pas lire le russe mais ce journal lui semble aller comme une mitaine en cuir avec les disques de Kraftwerk et de Bowie qu’il écoute en boucle. Punk c’était déjà hier, et la génération qui est venue juste après a mis la dose sur tous les défauts : le cynisme, la dope, un certain dandysme et son nihilisme afférant. Les Chérubins électriques fut le seul roman de Guillaume Serp, connu autrefois sous le nom de Guillaume Israël, chanteur des Modern Guys, groupe oublié inscrit dans le sillage Rose Bonbon de Taxi Girl. Sa mort à 27 ans ne lui a pas laissé le temps d’en écrire un autre, ni de signer le premier film auquel il rêvait, en s’exilant à LA – Paris devenant mortifère. Introuvable depuis sa sortie en 1983 (son auteur n’avait même pas alors 23 ans), ce roman d'apprentissage est enfin réédité par <i>L’Éditeur singulier</i>. On y entend, encapsulé et synthétisé, l’esprit d’une époque désespérée, celle des transitions. C’est la même chanson que dans <i>les Nuits de la pleine lune</i>. On croit que cette chanson est douce mais elle est pleine d’épine. Possible que ce livre imparfait et direct puisse nous servir encore de manuel de survie pour marcher dans Paris, du soir au petit matin, l’hiver, emmitouflés dans un manteau de feutre, un journal soviétique roulé sous le bras pour dernière contradiction. <br />
Nous aussi, nous voulons une nouvelle vie. <br />
<br />
<b>«Alexandre m’avait donné rendez-vous chez lui à 10 heures et il n’était encore que 9 heure et demie. J’étais passé au <i>Drustore</i> acheter quelques revues, dont <i>La Pravda</i> que je ne comprenais absolument pas, mais que j’achetais régulièrement parce que je trouvais que cela faisait très chic. Je décidais de me rendre chez lui à pied ; de braver le froid et les regards dégoûtés de la foule du samedi soir, qui se retournait sur moi, ce drôle de type au visage angélique et aux habits bizarres. Il faut dire qu’à l’instar de Cassandre la veille, j’étais tout de rouge vêtu : bottes rouges, pantalon rouge, pull rouge et veste en plastique rouge. <br />
Il semblait content de me revoir. Et alors que je jetai sur la table basse les magazines feuilletés en chemin, il me proposa de la coke. Évidemment, avec ce froid, et toutes ces gueules de gerbe mal refroidies que j’avais croisées, j’étais enchanté. » (p. 33)</b><br />
<br />
<a href="http://4.bp.blogspot.com/-syw4zKTR3bo/UrwKPeLhAMI/AAAAAAAABOg/dGsgUUijlFU/s1600/concours-sourires.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-syw4zKTR3bo/UrwKPeLhAMI/AAAAAAAABOg/dGsgUUijlFU/s400/concours-sourires.jpg" /></a><br />
<b>Guillaume Serp, <i>Les Chérubins Électriques</i>, 1983, Robert Laffont, réédition L’Éditeur singulier, Paris, 2013</b><br />
pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-27734400264655490692013-12-24T03:00:00.001-08:002013-12-24T03:20:37.654-08:00Anders Petersen (par) Christian Caujolle, Juste entre nous, 2013<a href="http://2.bp.blogspot.com/-y9y9V3VKPPM/Urlp4KusHmI/AAAAAAAABN0/N0K0tz9svkY/s1600/anders-petersen-par-christian-caujolle-juste-entre-nous-.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-y9y9V3VKPPM/Urlp4KusHmI/AAAAAAAABN0/N0K0tz9svkY/s320/anders-petersen-par-christian-caujolle-juste-entre-nous-.jpg" /></a><br />
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<br />
C’est un petit livre format poche vendu trop cher, édité trop vite (la maquette a sauté plusieurs fois et des coquilles se baladent un peu partout). Pour Autant, c’est un livre qui tient jusqu’au bout son projet, qui est de coucher sur papier quelques nuits de conversation entre un très grand photographe, Anders Petersen, et un très grand critique et ancien directeur d’agence (VU), Christian Caujolle. Le photographe est un homme simple et le critique son ami depuis des années. Ce n’est pas un livre théorique mais un livre d’idées. Ce n’est pas un livre de souvenirs, mais la mise au point s’y fait en permanence. J’ai passé mes deux dernières nuits à les lire, donc à les écouter, me tenir confinés dans leur intimité. J’avais parfois l’impression d’être là vers minuit chez Madame Paulo, avec la même cassette d’Aznavour qui tourne en boucle, froissée toujours au même endroit, et qu’Antoine (qui a fait la photo de couv’) allait pousser la porte du café à tout moment. <br />
Tant de chaleur conjuguée.<br />
<br />
<b>«On ne pense pas. On ne se préoccupe pas d’être dans la bonne position, on ne pense pas au danger, on ne se demande pas si on agit de manière responsable ou pas ; c’est assez horrible ! Ce n’est plus décent… Tu peux voir ça chez beaucoup de photographes. Il n’y a pas à être photographe pour ça. , tu as ça chez beaucoup d’écrivains, et des gens passionnés. Ils sont préoccupés mais ils sont insouciants dans le même temps. Ils sont préoccupés. Mais ils ne pensent pas au résultat, à la manière dont leur travail va sortir. L’élément le plus important pour eux, c’est de rejoindre une dynamique, de participer et de trouver un présence. Identifier une présence, c’est ça l’important. C’est ce que Moriyama montre dans ses photos. <br />
Et tu peux aussi sentir qu’il est solitaire. Mais qu’il est actif. Il n’est pas dans on coin à dire au monde « Je suis seul », il agit, il construit, il utilise ce sentiment comme un trampoline. Je n’ai jamais parlé de ça. Mais c’est aussi ce que je sens. Je me sens lié à ça.» (p. 53)</b><br />
<br />
<a href="http://2.bp.blogspot.com/-4gujwuY8R24/Urlt-0BdRbI/AAAAAAAABOI/6vDwFUq2nY8/s1600/cafe10.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-4gujwuY8R24/Urlt-0BdRbI/AAAAAAAABOI/6vDwFUq2nY8/s400/cafe10.jpg" /></a><br />
<br />
<br />
<b>Anders Petersen (par) Christian Caujolle, Juste entre nous, André Frère éditions, Marseille, 2013</b><br />
pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-1148612398421688652013-12-11T11:20:00.002-08:002013-12-11T14:30:21.799-08:00Elisabeth Tonnard, In This Dark Wood, 2008<a href="http://1.bp.blogspot.com/-uUNciWWPDW0/UqjSmbM5NSI/AAAAAAAABNU/Af7r9DloCbE/s1600/artbook_2272_1245764817.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-uUNciWWPDW0/UqjSmbM5NSI/AAAAAAAABNU/Af7r9DloCbE/s320/artbook_2272_1245764817.jpg" /></a><br />
<br />
Spirale infinie de la variation ? En 2008, Elisabeth Tonnard, artiste et poète hollandaise, puisait dans l’immense collection Joseph Selle (conservée au Rochester Visual Studies) quatre-vingt dix photographies d’hommes et de femmes (marins, dactylos, hommes d’affaires, femmes au foyer, que sais-je ?...) marchant les yeux dans le vague, parfois la tête basse, la nuit, toujours la nuit, dans les rues de San Francisco, dans un espace-temps probablement situé, si on en croit les vêtements, les allures, entre la fin des années 50 et le mitan des années 60. <br />
Selle n’était pas un grand photographe, il n’avait aucun surmoi. Il était un anonyme photographiant d’autres anonymes. Son job consistait à prendre au flash des photos de gens rentrant du travail ou se rendant, mis sur leur trente-et-un, à un rendez-vous amoureux. Ces photos, ils pouvaient passer les prendre le lendemain à la boutique (le "Fox Movie Flash"). Si le "date" s’était bien passé, ils venaient. S’ils avaient été payés et qu’il restait encore quelque chose sur cette paie, ils venaient. Beaucoup ne sont pas venus et ont rendu ces tirages à la nuit. Selle en a légué plus d’un millier à Rochester.<br />
<br />
<a href="http://2.bp.blogspot.com/-fGrWxlOtvLY/Uqi5QCD9Q6I/AAAAAAAABMk/6oD3NPQ5v2Y/s1600/Tonnard_ex_6a.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-fGrWxlOtvLY/Uqi5QCD9Q6I/AAAAAAAABMk/6oD3NPQ5v2Y/s320/Tonnard_ex_6a.jpg" /></a><br />
(<b>"When half my days were spent i found myself in a dark wood, and off the right path."</b>)<br />
<br />
Parmi eux donc, ces 90 photos de nuit, passage furtif d’âmes perdues, de solitudes en marche. Tonnard les a accompagné à chaque fois d’une citation de Dante, quatre-vint dix fois la même première phrase d’<i>Inferno</i>. <br />
<br />
<i>Nel mezzo del cammin di nostra vita / mi ritrovai per una selva oscura / che la via diritta era smarrita.</i><br />
<br />
Sauf que ce même n’est jamais le même : la strophe de Dante a été, à travers les siècles, traduite par 90 traducteurs différents. Chacun fit résonner les mots de Dante autrement, selon une autre combinaison, une autre ordonnance, une autre rythmique, un autre jazz.<br />
Dans <i>In This Dark Wood</i>, chaque image renvoie à une traduction différente. Ici, tout se ressemble. Ici, tout est unique.<br />
<br />
<a href="http://2.bp.blogspot.com/-4pb4us-W6go/Uqi5dgqgGoI/AAAAAAAABMs/ZLr4KmOH5Bs/s1600/dante_01.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-4pb4us-W6go/Uqi5dgqgGoI/AAAAAAAABMs/ZLr4KmOH5Bs/s320/dante_01.jpg" /></a><br />
(<b>"Midway along the journey of our life, i woke to find myself in a dark wood, for i had wandered off from the straight path."</b>)<br />
<br />
<br />
Alors ce livre, qui n’a qu’un sujet, ne déploie qu’une figure, ne bégaie qu’une seule et dernière solitude, bloque sur la même phrase comme un disque rayé, plutôt que de se refermer sur un petit monde rétréci, s’ouvre sur un abyme de nuances devant lequel on perdait presque pied. <br />
Ils passent sous nos yeux, corps et mots. Tous différents, tous semblables. Et à la fin, toujours aussi seuls.<br />
<br />
<a href="http://1.bp.blogspot.com/-wgHSY4nMnOo/Uqi5lkM0y_I/AAAAAAAABM0/7B_OgZp-LRI/s1600/Tonnard_ex_1a.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-wgHSY4nMnOo/Uqi5lkM0y_I/AAAAAAAABM0/7B_OgZp-LRI/s320/Tonnard_ex_1a.jpg" /></a><br />
(<b>"Halfway through our trek in life, i found myself in this dark wood, miles away from the right road."</b>)<br />
<br />
<br />
<b>Elisabeth Tonnard, <i>In This Dark Wood</i>, self-published in 2008, reprinted in october 2013 by J&L Books, New York.</b><br />
<br />
pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-76287148157343423862013-12-08T14:11:00.000-08:002013-12-08T14:11:45.890-08:00Baltimore, David Simon, Sonatine 2012 (trad. 1990)<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://3.bp.blogspot.com/-T7b0NO4pNvQ/UqTs5TIgodI/AAAAAAAAAHg/z-RofBcAt78/s1600/baltimore.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="http://3.bp.blogspot.com/-T7b0NO4pNvQ/UqTs5TIgodI/AAAAAAAAAHg/z-RofBcAt78/s200/baltimore.jpg" width="125" /></a></div>
<span style="font-family: Calibri;">C’est la matrice, le texte qui a fait passer David Simon des
pages Faits divers du <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Baltimore Sun</i>
aux bureaux des chaînes de télévision - <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Homicide</i>,
la série en 7 saisons de Barry Levinson, est directement tirée de ce livre, en
attendant, bien sûr, l’impérial <i style="mso-bidi-font-style: normal;">The Wire</i>
où Simon fera revivre quelques unes des figures de flics passionnés qui peuplent
cet énorme livre. Mais auparavant, il y avait donc eu <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Baltimore</i> (ou plus justement, en VO, <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Homicide : A Year on the Killing Streets</i>), presque mille pages
d’immersion en eaux profondes auprès des inspecteurs du bureau des homicides de
Baltimore.<o:p></o:p></span><br />
<span style="font-family: Calibri;"></span><br />
<span style="font-family: Calibri;">Cela commence d’ailleurs comme <i style="mso-bidi-font-style: normal;">The Wire</i> avec ce rythme lent, à la limite de l’ennui, qui est celui
d’un quotidien lesté par la routine bureaucratique de la procédure et par l'angoisse de l'incertitude (dans la vraie vie, chaque meurtre est une porte fermée dont on n'est jamais sûr que l'on trouvera la clé un jour). </span><br />
<span style="font-family: Calibri;"></span><br />
<span style="font-family: Calibri;">On est avec
deux inspecteurs, Jay Landsmann et Tom Pellegrini, tout juste arrivés sur la
scène de l’un de ces meurtres de dealers qui ne font même pas une ligne dans le
journal mais qu’ils devront quand même résoudre, s’ils ne veulent pas voir
leurs statistiques – et leurs primes d’heures supplémentaires – fléchir à la
fin du trimestre. On commence par ce meurtre-là parce que c’est celui du 18
janvier, le début de l’année, le début du « stage » de David Simon au bureau
des homicides dans l’équipe de Gary D’Addario (15 inspecteurs, trois sergents,
un lieutenant), le début de son livre. Et on ira comme ça jusqu’au 31 décembre,
quand les mêmes serreront l’assassin stupide des frères Fullard, un autre
meurtre de dealers, une dernière élucidation pour l’année.<o:p></o:p></span><br />
<span style="font-family: Calibri;"></span><br />
<span style="font-family: Calibri;">Le livre se déploie avec l’année qui avance, un meurtre
après l’autre – dealers abattus, scènes de ménage, rixes d’ivrognes, et de
temps en temps l’extraordinaire, une serial-killeuse de maris à la Landru, une
petite fille violée et éventrée, un tir policier suspect…–, chaque affaire
transformée en numéro à l’encre rouge sur le tableau du bureau, jusqu’à ce que
l’encre passe au noir, affaire élucidée. C’est le travail de ces hommes, et c’est
ce dont parle <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Baltimore</i>, Simon dispersant
tout le long de l’année qui s’écoule ses 10 lois de la sagesse <i style="mso-bidi-font-style: normal;">tongue-in-cheek</i> de l’inspecteur d’homicides
(règle n° 5 : <i style="mso-bidi-font-style: normal;">« c’est bien d’être
un bon, mais c’est encore mieux d’être chanceux »</i> ; règle n°8 :
<i style="mso-bidi-font-style: normal;">« si tu n’as aucun suspect apparent,
le labo ne te sortira aucune preuve. Si tu as un suspect qui a déjà avoué et a
déjà été identifié par deux témoins, le labo te donnera des empreintes, des fibres,
une correspondance sanguine et une correspondance balistique »</i>), tout
en explorant les diverses stations de l’enquête criminelle (la scène de crime, l’autopsie,
l’interrogatoire, jusqu’au procès d’assises).<o:p></o:p></span><br />
<span style="font-family: Calibri;"></span><br />
<span style="font-family: Calibri;">C’est incroyablement précis, incroyablement humain aussi, lorsque
l’on dérive avec ces inspecteurs qui sont l’élite du Département de la Police
de Baltimore et qui, régulièrement, s’assomment à l’alcool jusqu’au petit
matin, avant de repartir pour un nouveau tour de garde à attendre qu’un autre être
humain meure de mort violente à Baltimore, Maryland. <o:p></o:p></span><br />
<span style="font-family: Calibri;"></span><br />
<span style="font-family: Calibri;">En 1997, Simon présentera le camp d’en face - la piétaille
des dealers des coins de rue du Westside - de la même manière, à hauteur d’homme, dans <i style="mso-bidi-font-style: normal;">The Corner</i>, co-écrit avec l’ex-flic Ed
Burns, croisé à l’époque où Simon était « stagiaire » à l’hôtel de
police. </span><span style="font-family: Calibri;">Et du mélange de ces deux livres naitra <i style="mso-bidi-font-style: normal;">The Wire</i>.<o:p></o:p></span><br />
Pierre Evilhttp://www.blogger.com/profile/07633036265289967374noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-40726088579654780292013-12-02T13:34:00.000-08:002013-12-02T13:34:04.666-08:00Quote : Malcolm Lowry, Under the Volcano, 1947 <a href="http://4.bp.blogspot.com/-AwSGrZvRjrM/Upz5UNJHTuI/AAAAAAAAAp8/ao9ejQztW7o/s1600/malcolm_lowry.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-AwSGrZvRjrM/Upz5UNJHTuI/AAAAAAAAAp8/ao9ejQztW7o/s320/malcolm_lowry.jpg" /></a><br />
<br />
<b>"Qu'est ce qu'une âme perdue ? C'est une âme égarée de la vraie route et qui cherche à tâtons dans l'obscurité des chemins de la mémoire."<br />
<br />
Malcolm Lowry, <i>Au-dessous du Volcan</i>, Gallimard, coll. Folio, 1959.</b>bazookahttp://www.blogger.com/profile/09239344261889427822noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-31554318187524139912013-11-16T02:41:00.000-08:002013-11-16T02:41:36.801-08:00Quote : Heliogabale ou l'anarchiste couronné, Antonin Artaud, 1934<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://1.bp.blogspot.com/-cXsobPAOF2o/UodLp-bI1XI/AAAAAAAAAHQ/eyA3x5EtKJ0/s1600/ANTONIN-ARTAUD-PENSEE-MAGIQUE-ET-EXPERIENCE-DU-CINEMA.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="238" src="http://1.bp.blogspot.com/-cXsobPAOF2o/UodLp-bI1XI/AAAAAAAAAHQ/eyA3x5EtKJ0/s320/ANTONIN-ARTAUD-PENSEE-MAGIQUE-ET-EXPERIENCE-DU-CINEMA.jpg" width="320" /></a></div>
<span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;">C'est un livre fou, furieux comme un torrent en crue, plein du rire dément d'Artaud complètement fondu dans son sujet : Heliogabale, enfant-empereur couronné à 14 ans, trucidé à 19, puis jeté dans les égouts de Rome (mais non, son corps d'adolescent était encore trop gros, même écorché, et le peuple déchaîné finalement jeta la dépouille bafouée du monarque honni dans le Tibre, "</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">à quelques remous de distance</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;">" du corps de sa mère ; "</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">et une telle vie, qu'une telle mort couronne,</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;"> écrit Artaud, </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">se passe, il me semble, de conclusion.</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;">"</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;"><br /></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;"><br /></span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;">Quote :</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Helvetica;"><br /></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Lorsqu'il fait nommer un danseur à la tête de sa garde prétorienne, il réalise là une sorte d'anarchie incontestable, mais dangereuse. Il bafoue la lâcheté des monarques, ses prédécesseurs, les Antonin et les Marc Aurèle, et trouve que c'est assez d'un danseur pour commander à une troupe de policiers. Il appelle la faiblesse : de la force, et le théâtre : de la réalité. Il bouscule l'ordre reçu, les idées, les notions ordinaires des choses. Il fait de l'anarchie minutieuse et dangereuse, puisqu'il découvre aux yeux de tous. Il joue sa peau pour tout dire. Et cela est d'un anarchiste courageux.</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Il continue enfin son entreprise de rabaissement des valeurs, de monstrueuse désorganisation morale, en choisissant ses ministres sur l'énormité de leur membre.</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">(...) Cela ne l'empêche pas de profiter lui-même de ce désordre, de ce relâchement éhonté des moeurs, de faire de l'obscénité un habitude ; et de mettre au jour, obstinément, comme un obsédé et un maniaque, ce que d'habitude on garde caché.</span>Pierre Evilhttp://www.blogger.com/profile/07633036265289967374noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-29303857504262424452013-11-11T07:24:00.002-08:002013-11-11T07:30:46.488-08:00Signifying Rappers - David Foster Wallace / Mark Costello - 1990 (rééd. Back Bay 2013)<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://4.bp.blogspot.com/-q6Q-XC8WXYQ/UoDq5i59czI/AAAAAAAAAHA/hOSijYxC5Hg/s1600/images-3.jpeg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-q6Q-XC8WXYQ/UoDq5i59czI/AAAAAAAAAHA/hOSijYxC5Hg/s1600/images-3.jpeg" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: left;">
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;">Découverte lors
d'une anachronique flânerie au WH Smith de la rue de Rivoli (remember l'époque
où nos excursions dans les librairies anglaises de Paris -RIP the Village
Voice- étaient déjà un petit voyage à l'étranger, coût du trajet inclus - le
livre de poche à 80 francs), cette réédition ressuscite une curiosité - un
essai vieux de presque 25 ans, exalté et maladroit comme une copie d’étudiant, signé
du héros tragique des <i>hipsters</i> littéraires des années 1990-2000, David Foster
Wallace, et de son colocataire de l'époque Mark Costello. Les poches remplies
de figures de style, Wallace s'y livre à un exercice inattendu de défense et
illustration de ce qu’il appelle le "Hard Rap", vu du point de vue du
jeune <i>nerd</i></span><span style="color: black;"> blanc
élevé à la <i>French Theory</i>, téléspectateur compulsif, théoricien solitaire de la
pornographie-comme-spectacle qu'il était alors.</span></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: left;">
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;"><i>Signifying
Rappers</i></span><span style="color: black;">, qui emprunte
son titre à un des morceaux de bravoure salace de Schoolly D et est dédié à
Lester Bangs, cherche à expliquer cette étrange fascination. Pour ce faire,
Wallace et Costello se sont faits journalistes, historiens, critiques. En
journalistes et en historiens, ils ne sont pas très bons. Leurs références sont
approximatives, leurs informations souvent erronées.</span></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: left;">
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;">Le livre ne vaut en
réalité que lorsqu’ils font ce que les blancs surdiplômés fans de rap font encore de
mieux : de la théorie. </span></span><span style="color: black;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Et en matière de
théorie, DFW était un</span></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> virtuose. Fasciné par le narcissisme
autoréférentiel des rappers, il construit une théorie du « rap comme
synecdoque » qui lui permet de déployer toute sa créativité d'amoureux des mots, mais aussi de la chose : "Our point of view, essay-wise, was always less what we knew than what we felt, listening"</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">. </span></div>
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;">Au fil des chapitres, </span></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">« </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;">D.</span></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> »</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;"> se livre ainsi à un</span></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;">e
longue défense en forme de ruban de Möbius, où chacune des
limites du rap de 1989 se transforme en atout - jusqu'à ce que </span></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">la mélancolie existentielle de l'auteur</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">ne reprenne le dessus</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> (Costello ne le savait pas à l'époque, mais son ami sortait juste d'une tentative de suicide, et ne tarderait pas à sombrer de nouveau), et le ruban de Möbius se retourne, </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;">chacune des forces des rappers se transformant tout à coup en faiblesse - <i>bêtes</i> <i>noires</i> du système, Chuck D, Schooly-D, Slick Rick et tous les autres étaient aussi ses plus sûrs soutiens. <i>Signifying
Rappers</i></span><span style="color: black;"> se referme sur cette conclusion désabusée, que le G-Funk
habillera bientôt de ses mélodies sucrées. Quant à David Foster Wallace, il n’écrira plus jamais sur le rap.</span></span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;"><br /></span></span>
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><span style="color: black;">L'article initial qui a servi de trame à l'ouvrage a été publié dans la <i>Missouri Review</i> à l'été 1990 et est lisible <a href="http://www.missourireview.com/archives/bbarticle/signifying-rappers/">ici</a>.</span></span>Pierre Evilhttp://www.blogger.com/profile/07633036265289967374noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-90685871432251423202013-11-08T10:23:00.003-08:002013-11-08T10:25:16.076-08:00Quote: George Bataille, Manet, Skira, 1955<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;"><br /></span>
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;"><br /></span>
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">"Au surplus, l'élégance sobre, l'élégance dépouillée de Manet atteignit vite la rectitude, non seulement dans l'indifférence, mais dans la sûreté active avec laquelle elle sut exprimer l'indifférence. L'indifference de Manet est l'indifference suprême, celle qui sans effort est cinglante, celle qui, scandalisant, ne daignait pas savoir qu'elle portait le scandale en elle. Le Scandale se voulant scandale manquerait à la sobriété. La sobriété est néanmoins d'autant plus parfaite qu'elle agit, qu'elle intervient activement. L'intervention résolue est le propre de Manet; elle le fit parvenir à l'élégance suprême."........p 73.</span><br />
<br />
<br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;"> </span>xgatitoxhttp://www.blogger.com/profile/02212462520844075854noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-34244771923257147592013-11-06T09:49:00.000-08:002013-11-08T10:26:13.710-08:00Quote: Simon Leys, The Hall of Uselessness, NYRB, 2011<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://3.bp.blogspot.com/-khw4ESqsWI8/UnqA6laMwaI/AAAAAAAAAhc/ssmgNeMDEgI/s1600/Unknown.jpeg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="http://3.bp.blogspot.com/-khw4ESqsWI8/UnqA6laMwaI/AAAAAAAAAhc/ssmgNeMDEgI/s200/Unknown.jpeg" width="165" /></a></div>
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;"><br /></span>
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;"></span>
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">"Traditionally, Chinese Scholars, Men of letters, artists, would give an inspiring name to their residences, hermitages, libraries and studios. Sometimes, they did not actually possesses residences, hermitages, libraries or studios-not even a roof over their heads-but the existence or the non-existence of a material support for a Name never appeared to them a very relevant issue".</span>xgatitoxhttp://www.blogger.com/profile/02212462520844075854noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-72432518171024945492013-11-03T06:26:00.001-08:002013-11-04T01:35:41.542-08:00Diane Keaton, Reservations, 1980<a href="http://1.bp.blogspot.com/-U-jiL8PVwws/UnZggZcBsTI/AAAAAAAABMA/lyG9yOdurmA/s1600/ReservationsDianeKeatonCrownHotelMiami.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-U-jiL8PVwws/UnZggZcBsTI/AAAAAAAABMA/lyG9yOdurmA/s400/ReservationsDianeKeatonCrownHotelMiami.jpg" /></a><br />
On parlait <a href="http://disciplineindisorder.blogspot.fr/2013/10/gilles-bonnecarrere-male-dancers-wanted.html">l’autre jour</a> de <i>Looking for Mr Goodbar</i>, un Richard Brooks de 1977 qui ressort à Paris en une seule salle quasi comble tous les soirs. On a même vu revenir, au bureau, des débats qui vous redonnent envie d’être cinéphile : sans vouloir trop spoiler, deux camps se sont affrontés. Ceux qui pensent (un peu vite, je crois) que Diane Keaton est sacrifiée à la fin pour maintenir intacte la morale américaine, et ceux (Joe et moi) persuadés que Diane Keaton se voit rattrapée par la violence et la connerie aveugle des mecs. Elle meurt d'avoir eu sur eux des années d’avance. Son personnage n’est pas sauvé, mais il n’est sûrement pas jugé. D’avoir voulu vivre comme elle l’entendait, elle n’avait d'ailleurs pas de faute à expier. <br />
Et tout ça m’a fait repenser à ce livre acheté 10$ il y a un peu plus d’un an à New York, un dimanche, tôt le matin. Un livre sous estimé, si tant est qu'il soit même connu. Le seul livre de photos de Diane Keaton. <br />
Je vous vois déjà venir, vous qui n’avez jamais supporté ce type de bouquins de stars/caprices des dieux. Je le sais parce que là dessus on est pareils. Encore pire si ces stars appartiennent à l’intelligencia new yorkaise (toute la vieille douleur ressurgie cette semaine avec la mort de Lou Reed ne nous fera pas admettre pour autant qu’il fut un bon photographe). <br />
Pourquoi alors ce Keaton là ? Pour sa réussite, unique en son genre. Pour son intelligence et son ironie. C'est une collection (au sens sériel du terme) de photos de lobbies d'hôtels, d’entresols et de salles réservées pour les interviews, pour les congressistes et les réunions des Rotary’s.<br />
<br />
<a href="http://1.bp.blogspot.com/-TWtS6b4l2z8/UnZgqMVkdBI/AAAAAAAABMI/G2ybyOKBADU/s1600/ReservationsDianeKeatonNewYork.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-TWtS6b4l2z8/UnZgqMVkdBI/AAAAAAAABMI/G2ybyOKBADU/s400/ReservationsDianeKeatonNewYork.jpg" /></a><br />
<br />
Keaton les a photographié vides, le matin quand il n’y a pas un chat. Lieu vidé, plantes vertes, moquettes panthères, espaces sans fenêtre, perspectives foutues à plat, des bouts de décors plantés là comme des autels dérisoires à la gloire d’un truc qui ne portait pas encore le nom de lifestyle. <br />
Ensuite, elle a sorti ça en 1980, chez Knopf (elle a toujours eu l’art de l’entregent). Ce qui peut vouloir dire que la majorité de ces photos ont pu être prises durant la promo américaine de <i>Hannie Hall</i>, ou de <i>Mr Goodbar</i>, ou de <i>Manhattan</i> ou d’<i>Interiors</i>.<br />
La liste des hôtels, en légende, est déjà en soi une forme de déclinaison post-moderne : le Crow hôtel (Miami Beach), le Plaza (New York) le Warwick (Philadelphia), le Sheraton (Pasadena), le Deauville Hôtel (Miami Beach), le Ashley (New York), l’Embassy (LA), le Caesars Palace (Las Vegas),le Ritz-Carlton (Boston), le Palm Springs Biltmore, le Pierre (NY), le Waldorf Astoria (NY), le Fontainebleau Hilton à Miami ou encore le Sterling Hôtel (Miami Beach). <br />
<br />
Je ne me fais aucune illusion: Le même livre, sorti à tirage limité, signé d’un jeune portugais vaguement hipster ou d’une pointure type Martin Parr ou Asger Carlsen flirterait déjà avec les 400 euros. Et vous tueriez pour l’avoir.<br />
<br />
<br />
<a href="http://4.bp.blogspot.com/-cHTo3cvL3LQ/UnZdAw4SRqI/AAAAAAAABL0/NUg9yCTdO3I/s1600/ReservationsDianeKeatonWaldorfAstoria.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-cHTo3cvL3LQ/UnZdAw4SRqI/AAAAAAAABL0/NUg9yCTdO3I/s400/ReservationsDianeKeatonWaldorfAstoria.jpg" /></a><br />
<br />
<br />
<b>Diane Keaton, <i>Reservations</i>, Alfred A. Knopf, New York, 1980</b> <br />
pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com3tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-56716427473405798992013-10-29T12:35:00.000-07:002013-11-08T10:25:48.202-08:00John Le Carré, A Perfect Spy, 1986<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://4.bp.blogspot.com/-N1MEgidMeoU/UnAMHQ-93RI/AAAAAAAAAg4/K8lNc0cwdOw/s1600/images.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-N1MEgidMeoU/UnAMHQ-93RI/AAAAAAAAAg4/K8lNc0cwdOw/s1600/images.jpg" /></a></div>
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><span style="font-size: small;">J'ai longtemps eu une tendance à passer à coté de Le Carré. Ne me corrigez pas si je me trompe mais je ne dois pas être le seul. <br />Pourquoi? trop 'légitime'? trop gros? trop 'propre sur soi', Espionnage? Déjà que… Espionnage à papa? etc, etc.<br />L'écrivain le moins branché du monde?<br />On le sait bien ici, une pile de mauvaises raisons ça fait une bonne raison s'y coller, et puis Garnier, Roth, ont toujours dit qu' <i>A Perfect Spy</i>, c'était très bien.<br />Oui, c'est très bien. Mieux même.<br />On va faire vite, pas besoin d'une vraie review, juste deux trois trucs en passant en forme de LISEZ-LE.</span></span><br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><span style="font-size: small;"><br />Le Carré sait y faire, il a été espion. Plus ou moins mais plutôt plus. Comme il le dit lui meme: 'la fonction du roman d'espionnage n'est que de fictionnaliser ce que l'on sait déjà de toute façon'. Intrigue et suspense, prenez ça sur le coin du rebondissement.<br />Chez Le Carré, via moi, semble se créer un drôle de court-circuit entre l'arcane et banal monde de l'espionnage ("mettez vos espions dans un bus, pas dans un jet") et l'écriture de Le Carré. Une <i>taupe </i> par exemple, c'est une expression de Le Carré reprise par les services sur lesquels il écrit, pas l'inverse (d'autres ne seront pas reprises: <i>baby-sitter</i>, <i>scalp hunter</i> etc…). Le premier choc, pour moi, c'est d'ailleurs cette écriture, comment dire… la pure expression d'un classicisme a l'anglaise? Il y a de ça… Mais aussi des éclairs de surréalisme (la vison de ce cabinet, véritable McGuffin a la Hitchcok tiré derrière la bentley, un maitre espion qui s'appelle <i>Brotherhood</i> et un grand-père <i>Makepeace Watermaster</i>). On met dans le même sac, un joli vernaculaire (<i>nellies, neverwozzers, lovelies and joes</i>) et une fulgurante, presque pétrifiante simplicité (<i>a representative of something, navigationnal problems</i>).</span></span><br />
<br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><span style="font-size: small;">Pourquoi <i>A Perfect Spy</i> et pas un autre? ils tournent tous autour de la métaphysique de l'espion finalement (<i>sometimes we had to do a thing in order to find a reason for it. Sometimes actions are questions to us not answers</i>).La trilogie <i>Smiley</i> est belle aussi mais c'est dans celui là que la machine qu'est tout roman d'espionnage commence à faire 'un drôle de bruit'. un léger <i>clank clank</i>. Nait l'envie de ne pas mettre d'huile.<br />Encore une histoire de court circuit. Entre le livre et Le Carré lui même cette fois: le père de Magnus Pym, si central au roman, escroc de haut vol-minable, c'est le père de Le Carré ( Ronnie Cornwell de son vrai nom 'souvent en vacances'-on vous renvoie aux conversations de JLC avec Myriam Gross pour plus de précisions). On sent le vécu plus que la documentation dans cet art, si important au genre, de la <i>location (</i>école privées anglaises, Berne l'ennuyeuse, maison de fonctions etc..) et de la <i>characterization</i> (on emmènera avec soi la moitié du livre, seconds rôles inoubliables de Lederer à Miss Dubber)…<br />Le truc qui vient du froid alors se réchauffe mais sans jamais devenir tiède. Les frontières entre ce qui se dit et ce qui se lit s'effritent, on entend ce qui ne se dit pas, l'axe fondamental Public/Privé ici se dédouble. Donnant un très beau livre, assez trouble et sur rien d'autre que la duplicité. Pas celle des espions, celle de tout le monde.</span></span><br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><span style="font-size: small;"></span></span><br />
<br />
<br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><span style="font-size: small;">On ouvre :<br /><span style="font-size: x-small;"><br /></span></span></span><span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><span style="font-size: small;"><span style="font-size: x-small;">"In the small hours of a blustery October morning in a south Devon coastal town that seemed to have been deserted but it's inhabitants, Magnus Pym got out of his elderly country taxi-cab and, having paid the driver and waited till he had left, struck out across the church-square. His destination was a terrace of ill-lit Victorian boarding-houses with names like Bel-a-Vista, The Commodore, and Eureka. In build he was powerful but stately, a representative of something. His stride was agile, his body forward-sloping in the best tradition of the Anglo-Saxon administrative class. in the same attitude whether static of in motion, Englishmen have hoisted flags over distant colonies, discovered the sources of great rivers, stood on the decks of sinking ships. He had been travelling in one way or another for sixteen hours but he wore no over-coat or hat. He carried a fat black briefcase of the official kind and in the other hand a green Harrods bag. A strong sea wind lashed at his city suit, salt rain stung his eyes, balls of spume skimmed across his path. Pym ignored them. Reaching the porch of a house marked 'no vacancies' he pressed the bell and waited, first for the outside light to go on, then for the chains to be unfastened from inside. While he waited a church clock began striking five. As if in answer to its summons Pym turned on his heel and stared back at the square. At the graceless tower of the Baptist church posturing against the racing clouds. At the writhing monkey-puzzle trees, pride of the ornamental gardens. At the empty bandstand. At the bus shelter. At the dark patches of the side streets. At the doorways one by one."</span></span></span><br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"></span><span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><span style="font-size: small;"><br /></span></span>xgatitoxhttp://www.blogger.com/profile/02212462520844075854noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-8288386482328816422013-10-27T05:10:00.000-07:002013-10-27T07:25:54.551-07:00Gilles Bonnecarrère, Male Dancers Wanted, 1976<a href="http://1.bp.blogspot.com/-uwb66Gu_WfI/Um0CmqxSd1I/AAAAAAAABLE/j1T5W6IW01E/s1600/1381477_550737104997981_2097746024_n.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-uwb66Gu_WfI/Um0CmqxSd1I/AAAAAAAABLE/j1T5W6IW01E/s400/1381477_550737104997981_2097746024_n.jpg" /></a><br />
<br />
<b>«New York, 1976. I am twenty-three years old. The house where i was living, wedged between two buildings at 42 Water Street, has just burned down. All that it held is gone. On a bench in Battery Park i find an old Village Voice with the following ad : «Male dancers wanted (experience not necessary)». On 46th street, near Broadway, i climb the narrow staircase up to a cashier’s window. Denise, the boss, says : « Are you here for the job ? Come in, have a look, see if you can do it.“</b><br />
<br />
Trouvé hier chez Yvon Lambert ce grand bouquin blanc, tiré seulement à 400 copies, renfermant des photos tenues au secret (au placard?) depuis 1976. On y voit quoi ? Un strip-club pédé, ses loges, ses danseurs. Puis, les mêmes mecs, le lendemain après-midi, chez eux, avec leurs rêves de réussite ou d'évasion. Leur sourire innocent. <br />
C'est la version gay de <i>Looking for Mr Goodbar</i> (vous n’avez jamais vu <i>Looking for Mr Goodbar</i> ? ça ressort à Paris, vous n’avez plus d'excuse) ou la version heureuse de <i>Cruising</i>. <br />
Le même New York, la même nuit disco, la même envie de ne jamais se trouver chez soi mêlée à la même inquiétude de ne pas avoir de chez-soi. <br />
Pas mieux comme document pour accompagner l'edit du <i>Keep the fire burning</i> de Gwen McCrae que jouait Harvey au Rex, jeudi. <br />
<br />
<br />
<a href="http://3.bp.blogspot.com/-EFZ4uIPrSfY/Um0CfeZKLKI/AAAAAAAABK8/5YEvIdzG2yU/s1600/slide_317928_2933334_small.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://3.bp.blogspot.com/-EFZ4uIPrSfY/Um0CfeZKLKI/AAAAAAAABK8/5YEvIdzG2yU/s400/slide_317928_2933334_small.jpg" /></a><br />
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<a href="http://4.bp.blogspot.com/-gIYWTnq5txM/Um0CT_2QWlI/AAAAAAAABK0/cpwJj1GTcNg/s1600/45_gillesbonnecarre%CC%80re.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-gIYWTnq5txM/Um0CT_2QWlI/AAAAAAAABK0/cpwJj1GTcNg/s400/45_gillesbonnecarre%CC%80re.jpg" /></a><br />
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<b>Gilles Bonnecarrère, <i>Male Dancers Wanted,</i> éditions Lutanie & Préféré, Paris, septembre 2013<br />
</b>pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-26609395248502989972013-10-25T08:28:00.001-07:002013-11-08T10:26:40.855-08:00Nancy Holt, Ransacked, 1980<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">Je devais finir ma relecture de <i>A Perfect Spy</i>, avec l'age, Le Carré, fascinant. </span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">Croisé Philippe hier au Rex, paquet vite filé, ex-jeunes gens modernes, c'est à dire de vieux hommes discrets.</span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">Dedans, l'attendu (non pas <i>attendu</i>, promis) <i>Pigs</i> de Spottorno. Dur. Une copie dédicacée a un certain Ari du <i><a href="http://disciplineindisorder.blogspot.fr/2012/09/paul-schiek-dead-men-dont-look-like-me.html">Dead Men Don't look like Me</a> </i> de Paul Schiek. Dur.</span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">Et puis, ce truc que je ne connaissais pas, <i>Ransacked</i> de Nancy Holt. On ouvre.</span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">Une écriture enfantine, photos d'une maison délabrée.</span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">C'est pas ça. Enfin si, mais non. </span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">On écrit cinq minutes après la lecture, peut-être on ne devrait pas. On ne devrait peut-être pas raconter l'histoire. Une histoire simple comme seul evil can be. Un truc banal, une mamie exploitée, spoliée par une bande de junkies, dont la grosse truie de chef se fait passer comme aide soignante. Parenthèse: ma grand mère est morte de l'Alzheimer, elle fut "accompagnée" comme on dit - mon cauchemar, petit, c'était justement ce truc. D'ailleurs Papa, pourquoi sa première "aide' fut elle virée hein?</span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">Esther, la mamie, c'est la tante de Nancy Holt, sculpteur(trice?) américaine, land art,femme de Robert Smithson, tout ça (pas d'esthétisme dans les photos de ses intérieurs saccagés mais on y voit peut-être ce qu'elle, l'artiste a pu y voir)...</span><br />
<span style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Oui alors… Ca finit bien, Nancy Holt réussit a se débarrasser de cette crasse, sa tante Esther pourra mourir de son cancer en paix (comme deux de mes tantes, une au mari presque 'Pat m'a tuer').</span><br />
<span style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Esther, et sa plume de gosse, ont alors laissé la place aux documents légaux. Pas un mot de trop. Rien.</span><span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;"> Les échos du<i> <a href="http://disciplineindisorder.blogspot.fr/2013/06/edmund-clark-control-order-house-2012_21.html">Control Order House</a> </i>d'Edmund Clark laissent alors place au sale gout du personnel. De la Politique de l'intime a la politique de intimité. On est content de la rareté de l'objet, parce qu'on se demande presque si on n'aurait pas aimé ne pas le recevoir (sans rancune Philippe).</span><br />
<span style="font-family: Courier New, Courier, monospace;">Je ne sais pas si j'aurais du écrire ça comme ça à froid, à chaud. Mais je suis sur que sinon, je n'aurais pas pu. </span><br />
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<a href="http://2.bp.blogspot.com/-4uNQhia39mQ/UmqNnnzT-AI/AAAAAAAAAgI/hChDHv075zc/s1600/Nancy+copy.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="400" src="http://2.bp.blogspot.com/-4uNQhia39mQ/UmqNnnzT-AI/AAAAAAAAAgI/hChDHv075zc/s400/Nancy+copy.jpg" width="329" /></a></div>
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<b>Nancy Holt, <i>Ransacked</i>, Printed Matter Inc, New York, 1980<b></b></b><br />
<br />xgatitoxhttp://www.blogger.com/profile/02212462520844075854noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-30413546239202856442013-10-13T01:55:00.000-07:002013-10-13T06:09:11.263-07:00Quote: Arnaud Viviant<a href="http://4.bp.blogspot.com/-HBVjKhLN0io/UlpgJPSqrAI/AAAAAAAABJ0/d7Qz5qHjPfs/s1600/7465426690_2c6ea7befa_b.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-HBVjKhLN0io/UlpgJPSqrAI/AAAAAAAABJ0/d7Qz5qHjPfs/s400/7465426690_2c6ea7befa_b.jpg" /></a><br />
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<b>«Ils avaient vécu l’âge d’or du métier, quand on pouvait devenir copain avec Bruce Springsteen rien qu’en l’interviewant, se débrouiller pour que Selby vende plus de livres en France qu’aux Etats-Unis, avoir Iggy Pop qui squatte à la maison après un concert et pour les plus fous se fixer avec Johnny Thunders. Ils avaient imposé le gonzo journalisme à la française, avec le Pléiade de Baudelaire qui dépassait de la poche du 501. A cette époque, le critique était un demi-dieu que les artistes respectaient ou suspendaient dans le vide du premier étage de la Tour Eiffel, comme les Stranglers, racontaient-on dans les chaumières, l’avaient fait avec Philippe Manœuvre.<br />
Mais quand, avec quelques amis, il était arrivé dans le métier, c’était déjà la fin de la soirée, la plupart des anciens avaient déserté, et il ne restait plus que des cadavres de bouteilles et des mégots écrasés dans le gâteau profané, ainsi qu’un pauvre ivrogne écroulé dans un coin. Le dj était déjà parti avec ses disques. Dans l’atmosphère assombrie, un unique couple dansait un slow bancal sur de la musique planante, au demeurant plutôt grecque qu’allemande. Et elle était diffusée à très faible volume, les voisins ayant fini par se plaindre du bruit. Alors, en se partageant un fond de vodka tiède arrachée aux mains elles aussi tièdes du Booz endormi, ses amis et lui comprirent qu’ils étaient venus pour éteindre les lumières, ce qui leur prit tout de même près de vingt ans.»</b>(p. 31)<br />
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<i>P</i><i>assage admirable d'un bon livre et soutien indéfectible à celui qui, d’un coup de fil, changea ma vie. C'était, oh my fuckin' god!, il y a déjà quinze ans.</i><br />
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<b>Arnaud Viviant, <i>La Vie critique</i>, Belfond, Paris, 2013</b><br />
Pix: Paul Simonon & Debbie Chronic by Bob Gruen, 1980<br />
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pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-55212801788240844822013-10-05T07:50:00.001-07:002013-10-05T10:50:30.730-07:00Michka Assayas, Les Années vides, 1990<a href="http://2.bp.blogspot.com/-pCHeSqq7U5Y/UlAnKOIG_SI/AAAAAAAABJY/ty4LFwRraaQ/s1600/front_cover_large.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://2.bp.blogspot.com/-pCHeSqq7U5Y/UlAnKOIG_SI/AAAAAAAABJY/ty4LFwRraaQ/s200/front_cover_large.jpg" /></a>Chaque jour désormais ressortent en vinyls des disques que j’avais eu l’adolescence d’acheter à leur sortie <a href="http://numerogroup.wordpress.com/2013/09/10/coming-to-an-lp-bin-near-you-nikki-sudden-jacobites/">ou presque</a>, et comme si cela ne suffisait pas, voilà qu’arrivent des rééditions de livres aimés il y a des années à peine, du moins il me semble, mais dont je lis en quatrième de couverture qu’ils sont, ah?, « <i>introuvables depuis longtemps</i> ».<br />
<i>Les Années vides</i> de Michka Assayas ressortent. C’était, en 1990, un court roman autobiographique (70 pages tout au plus) paru chez <i>L’Arpenteur</i>. L’évocation serrée, blanche, d’une éducation sexuelle. Celle d’un adolescent taciturne, presque mutique, initié par une prof de français de C.E.S. dont les bouts de seins ressemblent à «<i>des petites saucisses de cocktails</i>» (ce détail m’est revenu en mémoire, et je suis ravi de le retrouver à sa bonne place, p.31). Tout ça dans la cour d’un lycée de banlieue parisienne des seventies à attendre à chaque printemps que Mai 68 revienne et que se reforment les Beatles. J’avais été surpris, à l’époque, par sa forme passive, son coté monocorde, son atonie (son agonie?) – elle était l’inverse du style fou furieux, rueur dans les brancards, que les anciens critiques rock se croyaient obligés d’arborer au moment de passer au roman. C’était là le livre d’un homme de trente-deux ans qui admirait Modiano, Jünger, et Arno Schmidt. Chaque paragraphe, court, concis, aurait pu servir de légende à un dessin de Floc’h ou de Sempé. Il y pesait tout entier le désenchantement d’une époque de transition (la fin des années 80/les premiers mois des années 90, époque de down généralisé, avant que l’arrivée de la techno ne balaie le ciel).<br />
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Je viens de le relire tout de suite après l’avoir racheté, ce midi au café, d’une traite, sans le relâcher (j’avais peur que sa fragilité ne l’effrite). Sa violence sourde m’impressionne soudain. J’ai peut-être enfin l’âge de recevoir en plein visage et dans toute leur dimension de dégoût de soi des choses aussi abruptes que <i>« J’étais né vide, j’arrivais vide, et je voyais des grands possédés par une folie dont j’étais envieux, mais incapable. »</i> On croirait un étang placide traversé en dessous par des courants souterrains inconnus. <br />
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<b>«Quand elle parlait de ce qui était «superficiel», j’avais toujours l’impression que c’était de moi qu’il s’agissait. Je la revois avec ses lunettes fumées, sa coupe de cheveux austère, son corps de crevette, je revois ce C.E.S. Jacques-Rivière, avec «ses surveillants sympa», sa «conseillère d’éducation» au maquillage de Cléopâtre et aux cheveux tordus dans un chignon haineux, cette directrice à la tête de pharmacienne hébétée, que j’ai encore envie de frapper à coups de ceinture, et ces «bandes» de mômes imbéciles, déjà contents d’eux, fiers de leur petite virilité minable.» (P. 25)</b><br />
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<b>Michka Assayas, <i>Les Années vides</i>, 1990, réédition Le mot et le reste, Paris, 2013</b> <br />
pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-7433798500689208423.post-15328593761450164422013-10-03T10:41:00.001-07:002013-10-05T08:44:43.255-07:00Quote: Anne Dufourmantelle, Puissance de la douceur, 2013<a href="http://1.bp.blogspot.com/-_1hX7lpa20I/Uk2ssIbUw1I/AAAAAAAABI8/K9bhIVFvW28/s1600/casa-de-lava-pc3.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://1.bp.blogspot.com/-_1hX7lpa20I/Uk2ssIbUw1I/AAAAAAAABI8/K9bhIVFvW28/s640/casa-de-lava-pc3.jpg" /></a><a href="http://4.bp.blogspot.com/-MyihwhgpRfI/Uk2u6iU9nWI/AAAAAAAABJI/Np3X0HU6kFk/s1600/casa-de-lava-pc1.jpg" imageanchor="1" ><img border="0" src="http://4.bp.blogspot.com/-MyihwhgpRfI/Uk2u6iU9nWI/AAAAAAAABJI/Np3X0HU6kFk/s640/casa-de-lava-pc1.jpg" /></a><br />
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<b>"Nous reconnaissons la douceur dans des figures littéraires qui ont tout bouleversé autour d'elle sans le vouloir. Le prince Mychkine, la majorité des personnages de Kafka, de Melville (Billy Budd surtout), des nouvelles de Tolstoï, le petit John Mohune des <i>Contrebandiers de Moonfleet</i> - communauté impossible de personnages qui arrivent de nulle part et sans se départir jamais d'une douceur inégalable. Ils provoquent violence et passion autour d'eux car leur radicalité est sans appel et sans mépris. Ces personnages qui incarnent la douceur en littérature révèlent les apparences sous lesquelles se dissimulent toutes les compromissions. Ils polarisent le réel autour d'une vérité inédite et impossible à soutenir. Bartleby et la servante d'<i>Un coeur simple</i> sont des hors-la-loi. <br />
Leur douceur fait violence à un monde qui a pour coordonnées des règles de servitude consentie."<br />
</b><br />
<b>Anne Dufourmantelle, <i>Puissance de la douceur</i>, p.68-69, Payot, Paris,2013</b><br />
<br />
Pix: <b>Pedro Costa, <i>Casa de lava - Caderno</i>, Pierre von Kleist, Lisboa, 2013</b>pornochiohttp://www.blogger.com/profile/12389835537448879453noreply@blogger.com1