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Friday, 23 September 2011

Bellow the bottom shelf whith... Bertrand Bonello

Vous voulez la vérité ? Un critique de cinéma ne cherche qu’une chose : un cinéaste dont les obsessions (même les inavouables, surtout les inavouables) rencontreraient les siennes. Ça n’arrive pas tous les jours, mais parfois quand même (sinon c’est la misère). Il est sans doute plus pratique que ce cinéaste miroir soit mort (close, l’œuvre ne pourra plus décevoir) mais il est quand même plus excitant et nourrissant que ce cinéaste là soit vivant. Et encore plus qu’il soit de notre génération. Bertrand Bonello est ce cinéaste pour moi, et je n'ai pas mis dix ans à le comprendre. Je ne le connaissais pas du tout la première fois que j’ai vu Le Pornographe, c'était à Cannes, mais j’ai vite compris que je n’étais plus seul dans mon coin à faire des ponts insensés entre Jean Eustache et le porno seventies; puis il y a eu des interviews où l’on se disait moins de choses qu’on n’en comprenait; puis il y a eu Tiresia, ce film dont je peux dire que je ne sais toujours pas de quoi il parle mais dont chaque plan tremble au plus profond de moi. Et cette Apollonide fin de siècle, sortie mercredi ? Elle met en scène un monde enlisé et hypnotique dans lequel je voudrai passer des heures, des siècles. C'est son plus grand film. C’est le plus beau film fait en France cette année, mais il n'est pas interdit de voir au-delà de la France et au-delà de l’année…
On aurait pu faire avec Bertrand Bonello un questionnaire musique (j’ai encore une compil northern soul à te uploader, au fait), c’est tombé sur les livres. C’est plus secret les livres, on n’en parle pas comme ça, dans un café, et encore moins en interview. La peur d'être cuistre, sans doute. Mais ce blog sert aussi à ça, à faire dire à des gens que l’on estime ce qu’ils ne nous ont pas confié tout au long de ces années et que, d'ailleurs, nous serions bien emmerdés de leur demander de vive voix. On est heureux, et fiers, et tout le reste, de rouvrir avec Bertrand Bonello une rubrique augurée il y a deux ans déjà avec Philippe Garnier, Mickey Moonlight et Didier "Tweet" Péron – lequel, le monde est riquiqui, a signé mercredi dans Libé un article sur l’Apollonide après lequel on ne souhaite à personne de passer. Quand vous aurez lu ça, vous saurez quoi faire. Le chemin de la salle n'est plus si loin, et les Souvenirs de la maison close si proches..
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Où lisez-vous? En musique? En silence, Le matin, La nuit?
Majoritairement, dans mon bureau. Un grand fauteuil rouge, ou un “lit de jour” suédois. Plutôt le jour.Vers 17h, 18h.Sinon, le métro et le train.Pas de musique. Ne pas mélanger.

L’ecrivain le mieux habillé, à vous yeux?
J’ai toujours trouvé Pasolini très bien habillé, alternant entre le costume/ cravate fine , le gilet avec coudière ou la veste en cuir italien. Et puis, il arrive même à porter de belle manière le short de football. Sans parler de ses montures fumées.

Quel titre de livre pourriez vous faire tatouer?
Rose Poussière.

Hors fiction, votre livre fetiche?
L’homme de cour, de Baltasar Gracian. Ou l’on voit que le monde finalement n’a pas tant changé que ça.

Une ligne d'un poeme?
“Si je ne brule pas, si tu ne brules pas, si nous ne brulons pas, comment les ténèbres éclaireront-elles la nuit ?”

Un livre a adapter au cinema de toute urgence?
J’ai rêvé à un moment une adaptation de Pétrole, de Pasolini
Sinon, Rêver sous le IIIème reich, de Charlotte Beradt

S'il ne restait qu'un livre sur le cinema?
Les Notes sur le Cinématographe de Bresson. Sans hésitation.

Que lire dans la salon d’un bordel?
Des choses courtes, des pensées… Oscar Wilde, peut-être. Des choses qui pourraient se partager rapidement.
Surtout rien de sexuel. Ce serait déplacé.

Un beau livre rare sur le bordel?
Nicole Canet va sortir un livre avec de rares photos et documents. Je pense qu’il sera beau.

Quel livre vous definirait le mieux?
Il y a quelques années, j’aurais dit Le métier de vivre de Pavese. Là, je ne sais pas. Je me sens un peu trop flou pour me définir. Surtout par un livre.

Votre Audiobook idéal?
Je n’aime pas trop qu’on lise pour moi. Je préfère trouver ma propre musique aux mots des autres.
Ou alors, qu’on me lise quelque chose dans une langue que je ne comprends pas, sans me traduire. Peut-être la Divine Comédie de Dante, lue en alternance par Nanni Moretti et Asia Argento.

Un livre ayant suscite chez vous un emoi sexuel (apres l'adolescence)?
Ma vie secrète, un anonyme anglais du XIXème, traduit par Pauvert. Une grande traversée.

L'ecrivain dont le style (ecriture) vous touche le plus?
Peut-être Bataille. Je le vois comme le plus grand styliste du 20ème siècle.
Il rapproche des mots jamais rapprochés auparavant. Il arrive à créer de ces rapprochements des émotions incroyables chez moi.

Un livre qui vous a fait pleurer?
C’est pathétique, mais je crois me souvenir que la mort d’un chien dans un livre de Houllebecq m’a tirée quelques larmes.
En même temps, si on est honnête, on pleure souvent pour de l’inavouable. (je parle de la mort du chien, pas de Houllebecq).

Un heros littéraire de votre enfance, un pour maintenant?
Sherlock Holmes m’a fasciné pendant une bonne partie de mon enfance. Le violon, la drogue, l’exigence…
Aujourd’hui, je crois que je l’aime encore.

Vous devez ecrire un titre de la serie SAS. Quel serait son titre? Quelle actrice pour la photo?
De Villiers est déjà allé très loin. Il est dur à battre. Mais je tenterai “SAS contre les fils de chien de la crasse.”
Tristane Banon en couverture.

Un grand roman de droite?
Beaucoup de grands auteurs sont de droite, il me semble.
J’avais beaucoup aimé les textes de Dominique de Roux, mais je ne les ai pas relus depuis longtemps.

Les livres de photos ou d’artistes vous touchent-ils?
Ils m’intriguent, m’intéressent, me nourrissent, mais me touchent peu. Excepté (mais ce ne sont pas que des photos), LES HISTOIRE(S) DU CINÉMA chez Gallimard. Bouleversant.

Votre Blake et Mortimer (ou Tintin) favori?
Les 7 boules de Cristal. Une histoire de dingue.

Un critique littéraire que vous pourriez suivre les yeux fermés?
J’ai toujours trouvé Sollers meilleur comme guide littéraire que comme écrivain. C’est déjà énorme.

Que lisez vous en ce moment et quel fut votre dernier choc litteraire?
Dernier choc littéraire: Roman avec cocaïne, de Aguéev, écrivain dont on ne sait rien. Là, ce moment, je ne lis rien. La rentrée littéraire m’a terrifié.

Les trois livres que vous recommandez toujours parce que vous pensez que personne d'autre ne les connait?
Je recommande souvent PETROLE, de Pasolini. Il n’est pas inconnu mais en fait, personne ne l’a lu.
Sinon, je ne me sens pas défricheur en littérature, ni en possession de raretés sublimes.

Quelque chose de redhibitoire dans un livre?
Le manque de littérature ? Ou de musique dans la littérature, comme dirait JJ Schuhl.

3 comments:

  1. Bertrand, de qui est ce poème que tu as reproduit ic et que l'on entend dans l'Apollonide?

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  2. Je ne suis pas Bertrand mais je crois qu'il s'agit de vers extraits d'un poème intitulé Kerem Gibi du célèbre poète turc Nazim Hikmet. Pourtant, si je me souviens bien du film, il me semble qu'une des filles les attribue à Henri Michaux.

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  3. Vous n'êtes pas Bertrand, mais vous avez tout bon, me dit Bertrand qui n'a pas réussi à poster un comment (le profil google tout ça...)

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